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Elanco & Proplan

27 février 2025

Thrombopénie auto-immune : le pronostic est excellent si le chien survit 30 jours après le diagnostic

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Courbe de survie de Kaplan-Meier. D'après López-Bailén et al., JSAP, 2025.
Courbe de survie de Kaplan-Meier. D'après López-Bailén et al., JSAP, 2025.
 

Les thrombopénies à médiation immunitaire ne sont pas très fréquentes chez le chien, mais représentent tout de même 3 à 19 % des cas de thrombopénie. Leur diagnostic n'est pas aisé, et repose généralement sur l'exclusion des autres causes de thrombopénie. Leur traitement associe des immunosuppresseurs et des soins de support (allant jusqu'à une transfusion de sang au besoin), dans l'objectif de limiter la destruction des plaquettes le plus longtemps possible après l'arrêt des médicaments. Car les rechutes sont fréquentes.

Ainsi, c'est leur pronostic à long terme qui a fait l'objet d'une étude rétrospective, publiée en libre accès dans le JSAP. (L'ACVIM a publié l'an dernier son consensus sur leur prise en charge : diagnostic et traitement).

Des affections primaires en large majorité

Les 49 cas inclus avaient été diagnostiqués et pris en charge au centre hospitalier de l'école vétérinaire de Dublin (Irlande), entre 2009 et 2020 ; il s'agissait de cas référés, ce qui a pu indirectement sélectionner des cas de plus grande gravité.

Ces chiens étaient âgés de 0,6 à 13 ans (7 ans en médiane) au moment du diagnostic, et plutôt de grand format (17 kg en médiane). Ils sont également répartis entre mâles et femelles (51 et 49 %). Diverses races sont représentées (18 en comptant les croisés), dont 6 cockers et 6 springers anglais (qui sont des races prédisposées).

Une thrombopénie auto-immune est le plus souvent primaire (81 % des chiens dans cette étude), sans que le mécanisme en cause ne soit clairement établi ; elle est considérée comme idiopathique.

Dans 9 cas ici (19 %), elle était secondaire, ce qui est rapporté pour diverses affections : inflammatoires (2 cas ici, de vasculites), infectieuses (1 cas, d'angiostrongylose), tumorales (5 cas dont 3 lymphomes), iatrogéniques (suite à un traitement médical, aucun cas ici), entre autres (1 cas d'hépatopathie dans l'étude).

Pronostic réservé à court terme surtout pour les maladies secondaires

Le taux de survie à l'hospitalisation est de 67 %, ce qui est faible (mais potentiellement en lien avec la gravité des cas). Les 16 cas décédés sont morts des conséquences de leur thrombopénie (hémorragie pulmonaire ou cérébrale).

  • Toute cause de décès confondue, le taux de survie décline très légèrement à 2 semaines post-diagnostic : il est alors de 69 %. Mais il diffère selon l'origine de la thrombopénie : il est plus faible lors de thrombopénie secondaire (56 versus 72 %).
  • Il est ensuite de 63 % à 3 mois : 56 % lors d'atteinte secondaire vs 67 % pour les atteintes idiopathiques.
  • Il est enfin de 51 % à 2 ans : 44 % lors d'atteinte secondaire vs 55 % pour les atteintes idiopathiques (voir graphique en illustration principale).

Le pronostic de survie apparaît donc moins bon lors de thrombopénie immunitaire secondaire.

L'espérance de survie atteint 985 jours en médiane (soit plus de 2 ans et demi). Mais elle est seulement de 225 jours lors d'affection secondaire contre 1084 jours lors d'affection primaire.

Intéressant : en excluant les chiens décédés dans les 30 jours suivant le diagnostic de thrombopénie immunitaire, la survie médiane est fortement prolongée. Elle atteint 3686 jours, soit plus de 10 ans ! C'est une information positive pour les propriétaires.

Elle est alors de 1473 jours (4 ans) contre 3686 jours (10 ans) selon que l'affection est secondaire ou primaire. Ainsi, une fois passé le premier mois, le pronostic de survie est excellent, en particulier pour les cas de thrombopénie immunitaire idiopathique.

Toutefois, le caractère primaire ou secondaire de l'affection n'est pas lié de manière significative au risque de décès.

Peu de facteurs pronostiques significatifs

En effet, divers paramètres ont été considérés pour rechercher des associations significatives avec le pronostic de survie, en particulier les caractéristiques démographiques des chiens, les signes cliniques et les anomalies clinicopathologiques au moment du diagnostic (détectées aux analyses sanguines ou par imagerie médicale). Et seuls 2 paramètres restent significatifs dans l'analyse multivariée :

  • Un hématocrite bas altère le pronostic de survie, ce qui est logique compte-tenu de son association avec la gravité de l'atteinte ; une anémie (hématocrite < 37 %) était présente chez 34 chiens (69 %) ; la valeur médiane de l'hématocrite était de 29 % ;
  • Une neutrophilie, au contraire, améliore les chances de survie ; elle a été mise en évidence chez 58 % des chiens (28/48) et marque potentiellement une activité de la moelle osseuse, améliorant les chances de réponse au traitement.

Les mêmes paramètres ont été évalués comme facteurs de risque d'une hospitalisation prolongée. Et ici aussi, seuls 2 d'entre eux sont significatifs dans l'analyse multivariée :

  • La présence de neutrophiles en bandes, observés à 31 % (15/49), est associée à une hospitalisation plus courte ;
  • Inversement, des ecchymoses ou des pétéchies, présentes chez près de 41 % des chiens (20 cas), sont associées à une hospitalisation plus longue, probablement en lien avec la gravité de l'atteinte.

L'influence des paramètres thérapeutiques a également été évaluée, en particulier le besoin d'une transfusion de sang (20 cas), le recours à des immunosuppresseurs de deuxième intention, concernant 13 cas ici (des corticoïdes, médicaments de première intention, avaient été administrés à tous les chiens), l'administration de vincristine (15 cas).

Mais seul l'usage d'immunosuppresseurs de 2e intention est associé à la durée d'hospitalisation, alors prolongée, ce qui n'est pas étonnant, s'agissant de cas plus graves ou difficiles à stabiliser. Et il n'a pas d'impact sur le pronostic de survie.