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Elanco & Proplan

4 mars 2025

Plantes en pots et chats d'intérieur, un mélange risqué

par Karin De Lange

Temps de lecture  4 min

Trois plantes toxiques
Le Spathyphilum et la Monstera ont été impliqués dans des cas mortels d'intoxication par ingestion chez des chats selon la base de données CAPAE-Ouest, pointés par un jeune consœur dans sa thèse soutenue à Oniris en 2024. Les phytotoxines du Cycas (ici, un Cycas revoluta) sont présentes dans l'ensemble de la plante, mais l'ingestion de 1 à 2 graines peut être fatale.
Trois plantes toxiques
Le Spathyphilum et la Monstera ont été impliqués dans des cas mortels d'intoxication par ingestion chez des chats selon la base de données CAPAE-Ouest, pointés par un jeune consœur dans sa thèse soutenue à Oniris en 2024. Les phytotoxines du Cycas (ici, un Cycas revoluta) sont présentes dans l'ensemble de la plante, mais l'ingestion de 1 à 2 graines peut être fatale.
 

Des 92 664 appels reçus par le Centre Antipoison Animal et Environnemental de l'Ouest (CAPAE-Ouest à Oniris) entre 2010 et 2022, 12 % concernaient des animaux de compagnie (chats, chiens, lapins), en lien avec des plantes. Environ la moitié (46 %) étaient liés aux plantes d'intérieur. L'analyse des données, présentée dans sa thèse vétérinaire soutenue en 2024 par une jeune consœur, montre que ce pourcentage a doublé en douze ans, passant de 7,5 % des appels en 2010 à 13,6 % en 2022. Selon l'auteure, cela pourrait s'expliquer par un intérêt croissant des propriétaires pour les plantes d'intérieur, mais aussi par une augmentation de leur sensibilisation à signaler de telles intoxications.

Plantes d'intérieur : le chat en tête

Si les chiens sont les premiers concernés par les intoxications en général (70 % des appels), les chats sont en pole position pour les plantes d'intérieur, avec plus de 50 % des appels au CAPAE pour ces motifs (la thèse précise qu'il convient de distinguer les plantes signalées lors d'appels des cas réels d'intoxication). Le chat semble être le plus sujet à ingérer une ou des plantes. En effet, dans l'enquête réalisée auprès de propriétaires, des 540 personnes possédant au moins un chat, 47,2 % ont répondu que leur animal avait déjà ingéré ou essayé d'ingérer une plante. Mais contrairement au chien, où plus de 50 % des ingestions de plantes d'intérieur concernent des jeunes chiens (< 12 mois), plus de 50 % des cas se produisent entre 1 et 7 ans chez le chat.

Un mode de vie strictement intérieur augmente le risque d'ingestion

Un mode de vie en intérieur des chats contribue à leur exposition accrue aux plantes présentes dans le foyer. L'étude a révélé que les chats ayant le moins accès à l'extérieur présentent une proportion plus élevée de cas d'ingestion de plantes d'intérieur. À l'autre bout du spectre, les chats ayant le plus accès à l'extérieur montrent une proportion plus faible d'ingestions. Deux propriétaires de chats ont précisé en commentaire de l'enquête que leur animal avait cessé de manger des plantes d'intérieur après avoir eu un accès régulier à l'extérieur. Le manque de stimuli d'un mode de vie strictement intérieur peut rendre les plantes d'intérieur particulièrement attrayantes comme objets de distraction. Fait surprenant, la présence de congénères semble augmenter de manière significative la probabilité qu'un chat ingère une plante d'intérieur.

Les plantes à risque

Le classement des dix plantes les plus souvent impliquées dans les appels au CAPAE (voir le graphique ci-dessous), montre le Spathiphyllum, les ficus et les succulentes en tête du classement. L'auteure précise qu'il convient distinguer les plantes signalées lors d'appels au CAPAE des cas réels d'intoxication. Chez le chat, les plantes les plus représentées dans les appels sont le Dracaena (71 %), le Yucca (53 %), le Ficus (48 %) et enfin le Spathiphyllum (42 %). Certaines plantes, bien que moins courantes, sont extrêmement toxiques et peuvent provoquer des signes graves, même si de très faibles quantités ont été ingérées : c'est le cas du Cycas (voir l'illustration principale). Ce genre, appartenant à la famille des Cycadaceae, contient 3 types de phytotoxines : des azoxyglycosides (dont la cycasine, la néocycasine et la macrosamine), la ß-methylamino-l-alanine et un composé à haut poids moléculaire non identifié. Ces molécules toxiques sont présentes dans l'ensemble de la plante, mais les graines les concentrent. De 1 à 2 graines peuvent suffire à tuer un chien de taille moyenne. Pourtant, dans certaines régions du monde, ces plantes et en particulier leurs graines, sont une source d'alimentation humaine en tant que farine.

Les dix principales plantes d'intérieur citées lors des appels aux Centre Antipoison Animal et Environnemental de l'Ouest, en lien avec l'ingestion par un animal de compagnie (Ziajko M., thèse vétérinaire, Oniris 2024).

 

Tableau clinique : généralement léger, parfois mortel

Les signes digestifs sont les plus fréquemment rapportés dans la base de données du CAPAE. Dans la littérature, des manifestations neurologiques (ataxie, mydriase, agitation, convulsions et hypertonie) et cardiorespiratoires (arythmies, bradycardie, hypotension et dyspnée) sont également citées. En général, ces signes apparaissent dans les heures suivant l'ingestion, bien que dans de rares cas, ils puissent se manifester quelques jours plus tard. Chez les chats, les signes sont généralement légers (70,1 % des cas selon les données du CAPAE), avec des troubles digestifs prédominants, tels que vomissements, diarrhée et hypersalivation. Toutefois, des cas graves, parfois fatals, ont été enregistrés (0,9 % des cas), notamment liés à des plantes comme le Spathiphyllum (fleur de lune, 3 cas) et la Monstera (plante gruyère, 1 cas).

Sensibilisation et prévention

Les consultations de médecine préventive semblent être les moments les plus propices pour communiquer et sensibiliser les propriétaires, en particulier s'ils sont novices et ont un jeune animal et indiquent qu'il ne va pas avoir accès à l'extérieur, selon l'auteure. La création d'une brochure, accessible en ligne, informant les propriétaires sur les plantes toxiques, les signes d'intoxication et les mesures à prendre en cas d'exposition pourrait renforcer l'information. Enfin, une sensibilisation directement sur les lieux de ventes de plantes serait également intéressante. Si l'étiquetages des plantes à risque pour la santé humaine est obligatoire, il existe une différence de sensibilité entre espèces. Cette distinction n'est pas forcément intuitive, et les propriétaires peuvent penser – à tort – qu'une plante sûre pour eux l'est également pour leurs animaux – comme le Cycas.