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Elanco & Proplan

19 juillet 2024

Lymphome canin : le pronostic est altéré lors de protéinurie

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

RPDU : rapport protéines sur densité urinaire. D'après Skinner et al., JVIM 2024.
RPDU : rapport protéines sur densité urinaire. D'après Skinner et al., JVIM 2024.
 

Le lymphome est une cause possible de protéinurie persistante chez le chien, découlant d'une glomérulopathie paranéoplasique dont les mécanismes demeurent méconnus à ce jour. Selon les résultats d'une étude sur 86 cas, cette protéinurie altère le pronostic de survie du lymphome, ce qui en rend sa détection potentiellement intéressante.

Entre 1 cas sur 2 et 1 cas sur 4 de chiens protéinuriques

L'étude a porté sur des cas nouvellement diagnostiqués de 2008 à 2020 au centre hospitalier vétérinaire de l'Université de Floride (Gainesville, États-Unis). Le diagnostic de lymphome avait été établi par cytologie et/ou histologie. Une analyse d'urine et un bilan sanguin devaient avoir été réalisés.

Une corticothérapie, un traitement anticancéreux ou le traitement d'une protéinurie bien sûr dans les 2 mois précédents, de même que des comorbidités comme un lymphome rénal ou un syndrome de Cushing, ainsi que des troubles urinaires (sédiment actif, bactériurie) étaient des critères d'exclusion. Une urine alcaline (pH > 8), qui peut altérer la détection d'une protéinurie (risque de faux-positif), l'était également.

Un total de 86 cas a ainsi été inclus. Et les chiens ont été distingués comme protéinuriques ou non-protéinuriques selon deux modes de détection d'une protéinurie :

  • À la bandelette urinaire, détectant 41 cas protéinuriques (+ à +++, soit au moins 30 mg/dl), soit 48 % de la cohorte, et 45 cas non-protéinuriques soit 52 % ;
  • Par le calcul du rapport protéines urinaires (en mg/dl, mesurées à la bandelette) sur densité urinaire (2 derniers numéros de la mesure au réfractomètre) – abrégé RPDU, réputé sensible mais peu spécifique –, détectant 22 cas protéinuriques (RPDU ≥ 1,5), soit 26 % de la cohorte, et 64 cas non-protéinuriques soit 74 %.

Une protéinurie apparaît ainsi fréquente au moment du diagnostic, observée chez presque la moitié des chiens à la bandelette et environ un quart d'entre eux en se basant sur le RPDU.

Il aurait été intéressant de disposer du RPCU (rapport protéines sur créatinine urinaires) afin de distinguer les deux groupes de chiens de manière plus fiable, mais les données des dossiers médicaux n'étaient pas suffisantes. Une autre limite des classifications utilisées est qu'elles sont basées sur une analyse d'urine isolée et non répétée.

Les chiens protéinuriques sont plus âgés

L'un des objectifs principaux des chercheurs était d'établir la prévalence de cette protéinurie, et ses éventuelles variations selon le type et le grade du lymphome.

Et sur ce point, leurs résultats ne montrent pas de lien. Au sein de la cohorte, les lymphomes étaient de grades I à V (sous-grade a ou b), et à cellules T (25 % des cas lorsque renseigné) ou B (75 %). Et aucun de ces paramètres n'est associé de manière significative aux cas de protéinurie. Une précédente étude avait déjà montré l'absence de lien avec le grade du lymphome, mais n'avait pas étudié son type comme facteur de risque de protéinurie.

En revanche, quelle que soit la méthode de diagnostic de la protéinurie, celle-ci touche des chiens significativement plus âgés (10 ans versus 8 en médiane).

Les autres paramètres démographiques du chien (poids, sexe) ou la méthode de récolte des urines ne varient pas entre les groupes.

2 à 3 mois d'espérance de survie de moins

Le lien entre pronostic de survie et protéinurie n'avait pas été étudié jusque-là chez le chien, et représentait l'objectif premier de ces nouveaux travaux.

À l'issue de la période d'études, fin 2021, seuls 6 des 86 chiens étaient encore en vie (5 non-protéinuriques et 1 protéinurique) et ont donc été écartés de l'analyse des délais de survie. Dans la cohorte initiale, 8 autres chiens ont également été écartés car perdus de vue lors du suivi, laissant ainsi 72 chiens inclus dans l'analyse.

Et les résultats montrent que ces délais de survie varient de manière significative selon le statut protéinurique du chien au moment du diagnostic de lymphome (voir graphiques en illustration principale).

  • Le délai médian est ainsi de 245 jours (environ 8 mois ; 91-399 jours) chez les chiens protéinuriques versus 335 jours (11 mois ; 214-456 jours) pour les non-protéinuriques lorsque la protéinurie est établie à la bandelette urinaire.
  • Il est de 237 jours en médiane (7,8 mois ; 158-306 jours) versus 304 jours (10 mois ; 173-434 jours) lorsqu'elle est établie par le RPDU.

Lorsque la protéinurie est distinguée entre légère ou sévère d'après le RPDU (1,5-2 ou > 2), les différences sont également significatives pour ces 2 sous-groupes par comparaison aux chiens non-protéinuriques.

L'origine de cette variation d'espérance de survie, potentiellement multiple (relative à la tumeur, aux interactions entre les 2 comorbidités, au traitement entrepris, à l'âge du chien…), resterait à étudier.