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Elanco & Proplan

28 août 2023

Leptospirose canine : en France, les sérovars  Icterohaemorrhagiae et Copenhageni de Leptospira interrogans dominent

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Origine régionale des 60 souches isolées d'autant de cas de leptospirose canine survenus en métropole entre 2019 et 2021 et identifiées par le laboratoire des leptospires et d'analyses vétérinaires de VetAgroSup (Garcia-Lopez et coll., 2023).
Origine régionale des 60 souches isolées d'autant de cas de leptospirose canine survenus en métropole entre 2019 et 2021 et identifiées par le laboratoire des leptospires et d'analyses vétérinaires de VetAgroSup (Garcia-Lopez et coll., 2023).
 

En France, 98,3 % des cas de leptospirose canine transmis laboratoire national de référence (Institut Pasteur) étaient liés à des groupes d'espèce appartenant à Leptsopira interrogans correspondant en majorité aux sérovars Icterohaemorrhagiae/Copenhageni. Ces espèces sont aussi impliquées dans deux cas humains sur trois. C'est ce qui ressort d'une étude exhaustive des souches isolées de cas de leptospirose canine et humaine entre 2019 et 2021 et publiée mi-août, « la première description globale des souches de Leptospira responsables d'infections aiguës chez l'humain et le chien en France métropolitaine ». L'étude montre aussi qu'un cas de leptospirose canine sur deux avait été vacciné.

110 souches humaines, 60 canines

Les auteurs rappellent que les espèces de leptospires sont à présent définies sur la base du séquençage génétique, avec 68 espèces au total, dont 8 sont pathogènes pour l'humain et l'animal : L. interrogans, L. kirschneri, L. noguchi, L. santarosai, L. mayottensis, L. borgpetersenii, L. alexanderi et L. weilli. Dans cette étude, ils ont utilisé le séquençage du gène lfb1 (code pour une adhésine), dont la variabilité a été démontrée comme cohérente avec la classification génomique des espèces des souches pathogènes de Leptospira. Ils ont sélectionné toutes les souches de cas humains (n=110) et (n=60) canins parvenus au laboratoire de référence entre janvier 2019 et décembre 2021, ne provenant que de métropole. Les cas humains proviennent des laboratoires hospitaliers (jusque début août, la leptospirose n'était pas maladie à déclaration obligatoire). Les cas canins provenaient du laboratoire des leptospires et d'analyses vétérinaires de VetAgroSup. Pour ces derniers, le statut vaccinal était renseigné et l'adresse du cabinet vétérinaire à l'origine de l'envoi a été utilisée pour la géolocalisation des cas (si l'adresse des maîtres n'était pas renseignée), voir l'illustration principale. Les souches avaient été identifiées à partir du sang (n=34), de l'urine (n=21) ou d'un échantillon de rein (n=5) du patient.

Deux espèces en canine

Le séquençage du gène lfb1 a permis d'obtenir, en plus de l'espèce en cause, les groupes d'espèce concernés :

  • L. interrogans dans 67/110 (60,9 %) des cas humains et dans 59/60 (98,3 %) des canins. Six groupes d'espèce étaient représentés chez les humains contre 5 chez les chiens. Les groupes d'espèce SG1 (sérovars Icterohaemorrhagiae/Copenhageni), SG5 (Bratislava/Lora/Java/Muenchen/Fugis/Bataviae/Valbuzzi) et SG10 (Canicola/Pomona/Kennewiki/Medanensis) étaient communs aux deux espèces. Une souche canine était SG14 et deux autres SG16, ceux-ci étant des groupes nouveaux pour la science (pas de sérovars attribués). Le SG1 représentait 65 % des souches canines, devant SG5 (25 %) et SG10 (3,3 %), conformément à des résultats publiés antérieurement.
  • L. kirschneri dans 39/110 (35,5 %) des cas humains et 1/ 60 (1,7 %) des canins. Deux groupes d'espèce étaient représentés chez les humains. Chez les chiens, seul le groupe SG5 (correspondant au sérovar Tsaratsovo) était présent (il concernait aussi 5 cas humains).
  • Et L. borgpetersenii dans 4/110 (3,6 %) cas humains, et aucun canin. Un seul groupe d'espèce était concerné.

Des groupes d'espèce nouveaux ont aussi été détectés parmi les souches humaines, ce qui « suggère que notre connaissance des souches responsables de la maladie reste incomplète ». Le fait de partager des souches de groupe d'espèce commune entre le chien et l'humain n'est pas signe de transmission :  pour le SG1 de L. interrogans, dominant dans ces deux hôtes, le réservoir principal du pathogène reste le rat.

Un chien sur deux vacciné

Pour la fréquence des cas, 2019 était l'année la plus représentée en canine (36 des 60 cas), il n'y a eu que 12 cas chaque année suivant (alors qu'en humaine le nombre de cas détectés n'a cessé d'augmenter d'une année sur l'autre). Les mois présentant le plus grand nombre de cas étaient juillet et septembre. Les deux tiers des cas (66 ;7 %) étaient des mâles. Les chiens jeunes et adultes étaient plus souvent représentés parmi les cas (43 % de moins de deux ans, 48 % de 3 à 9 ans), avec un âge médian de 4 ans. Le statut vaccinal était renseigné pour 54 des 60 cas : pour 30 d'entre eux, l'animal était vacciné, selon « le protocole vaccinal complet ». C'est-à-dire « avec des vaccins L4 (63,3 % des chiens ; vaccin actif contre les sérovars Icterohaemorrhagiae, Canicola, Grippotyphosa et Pomona), des vaccins L3 (20 %, sérovars Icterohaemorrhagiae, Canicola et Grippotyphosa) ou des vaccins L2 (16,7 %, sérovars Icterohaemorrhagiae et Canicola) ».

Le fait que la majorité des cas de leptospirose canine soit identifié en Auvergne-Rhône-Alpes est probablement en lien avec la notoriété du des leptospires et d'analyses vétérinaires de VetAgroSup. Les auteurs espèrent « une surveillance plus régulière des cas canins dans différentes régions françaises sur une période de plusieurs années ». Elle permettrait, selon eux, « d'avoir une idée plus précise des génotypes de Leptospira circulant dans cette espèce et d'établir les bases épidémiologiques de la transmission entre l'homme et le chien », et « de mettre à jour les mesures préventives chez les humains et les animaux ».