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18 août 2016
Prescriptions et coproscopies peuvent freiner des résistances qui inquiètent (aussi) chez les chiens et les chats
La résistance anthelminthique ne concerne pas que les moutons ou les chevaux. Les nématodes des chiens et les chats, notamment les ascaris et les ankylostomes, développent aussi des résistances qui inquiètent le comité vétérinaire de l'Agence européenne du médicament (EMA). Dans toutes les espèces animales, chez les herbivores, comme chez les carnivores, ce comité s'alarme de la résistance anthelminthique, même aux molécules les plus récentes.
Dans un projet de note de réflexion, l'Agence européenne fait donc de nombreuses recommandations pour freiner ou retarder l'émergence de la résistance anthelminthique qui la préoccupe.
Elle recommande de ne plus vermifuger les animaux en routine, mais de s'appuyer sur un diagnostic parasitologique précis, basé, par exemple, sur une coproscopie. Pour éviter les vermifugations trop fréquentes et de routine, elle préconise donc de classer (tous) les antiparasitaires internes (API) dans la catégorie des médicaments sur prescription.
En France, la plupart des vermifuges destinés aux animaux de compagnie ont été, à l'inverse, exonérés de l'obligation d'une prescription en 2012. En productions animales, la prescription est obligatoire dans la quasi-totalité des cas. Mais les anthelminthiques sont souvent considérés comme des médicaments de prévention. Ils entrent dans les plans de sanitaires d'élevage (PSE) et peuvent être vendus sur prescription par les groupements agréés.
Les recommandations de l'Agence européenne ne sont toutefois pas contraignantes. Il est donc peu probable que les exonérations en vigueur depuis 2012 pour les vermifuges pour chiens et chats soient remises en cause à court terme.
Selon l'Agence européenne du médicament, la résistance aux anthelminthiques émerge dans les trois à neuf ans suivant le début de leur commercialisation. Ces résistances concernent tous les classes d'anthelminthiques, y compris les plus récents. Les nématodes des moutons sont les premiers visés mais ce ne sont pas les seuls.
Comme pour l'antibiorésistance, la résistance anthelminthique découle d'une pression de sélection exercée, non sur les bactéries, mais sur les parasites. Les plus sensibles disparaissent avec l'usage de ces molécules. Alors que ceux qui résistent sont sélectionnés pour devenir peu à peu la population prédominante.
Les tests de détection des résistances, basés sur le comptage d'œufs dans les coproscopies, ne sont pas sensibles. Lorsqu'une résistance est observée, la proportion de parasites résistants est déjà très élevée, au minimum de 25 % par exemple chez les ovins.
Comme pour les antibiotiques, le sous-dosage et un usage répété des anthelminthiques d'une même classe favorisent le développement des résistances. La rotation avec différentes classes d'anthelminthiques retarde donc le développement des résistances.
L'Agence s'oppose aux fréquentes vermifugations de routine. Car elles ne sont « pas toutes nécessaires » et elles contribuent à sélectionner les parasites résistants.
Pour limiter le nombre de traitements, la décontamination des pâtures est préconisée, en évitant le surpâturage, en favorisant le drainage des prés (contre les douves), voire en réalisant un ramassage des crottins chez les chevaux.
Chez les herbivores, la pratique « drench-and-move » (traiter puis changer de pré) favorise le développement de populations de parasites résistants en restreignant les refuges. Les refuges de populations de parasites non exposés à l'antiparasitaire ralentissent beaucoup le développement de la résistance. Ils évitent que seuls les parasites les plus résistants survivent après la vermifugation. Par exemple, il s'agit de préserver la présence de stades larvaires de parasites sensibles dans l'environnement (pâturages). Dans un groupe d'animaux, il est aussi possible de conserver quelques individus non traités mélangés aux animaux traités. Chez les chevaux, la présence de larves de cyathostomes enkystés, non accessibles à la plupart des nématocides, est considérée comme un refuge qui ralentit le développement de résistances.
Les associations de plusieurs molécules dans un même vermifuge ont été présentées comme permettant d'éviter l'apparition de résistances. Mais ces associations peuvent aussi à l'inverse favoriser les résistances croisées.
Au final, l'Agence européenne du médicament préconise donc plusieurs mesures à intégrer à un plan de lutte contre la résistance anthelminthique.
Pour mieux détecter l'émergence de ces résistances,
Dans les dossiers d'AMM, les laboratoires devront à l'avenir mieux documenter la résistance anthelminthique (par des essais terrain ou de laboratoire) et, sans doute, mieux la surveiller post-AMM.
Les alternatives aux anthelminthiques chimiques devraient être recherchées, notamment en termes de conduite d'élevage, ou d'alternatives biologiques.
Les vétérinaires et les propriétaires d'animaux seront, à l'avenir, davantage sensibilisés et informés sur l'importance et la prévalence des résistances aux anthelminthiques.
Cette problématique sur la résistance anthelminthique rappelle évidemment celle sur l'antibiorésistance. Toutefois, le risque n'est pas ici pour la santé publique, mais pour la santé animale avec la perte d'efficacité des antiparasitaires existants. Il n'y aura donc pas la pression des lobbies de santé humaine pour faire adopter des mesures aux vétérinaires au nom du concept « one health ». Ainsi, il n'y a pas non plus d'anthelminthique « critique » à préserver pour la santé humaine.
Néanmoins, les recommandations de l'Agence européenne ressemblent à celles déjà mises en place pour limiter l'antibiorésistance : surveillance accrue, réduction des usages par la suppression des traitements en « routine » sans diagnostic parasitologique, développement des alternatives, meilleure conduite d'élevage, sensibilisation et information des acteurs, etc.
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