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Elanco & Proplan

2 décembre 2024

Traitement de la PIF avec le GS-441524 : enquête sur l'expérience des propriétaires

par Pascale Pibot

Temps de lecture  6 min

L'administration du GS-441524 par voie sous-cutanée est douloureuse pour le chat et se révèle très difficile à faire par les propriétaires. Les chats apprennent à se cacher pour éviter les injections (cliché Pixabay).
L'administration du GS-441524 par voie sous-cutanée est douloureuse pour le chat et se révèle très difficile à faire par les propriétaires. Les chats apprennent à se cacher pour éviter les injections (cliché Pixabay).
 

En France, deux pharmacies, Delpech et FrancePrep, commercialisent désormais des préparations magistrales de GS-441524 (métabolite actif du remdésivir), rendant ainsi possible sa prescription pour le traitement de la péritonite infectieuse féline (PIF, voir LeFil du 13 septembre).

La PIF est une maladie à coronavirus mortelle chez les chats mais l'antiviral GS-441524 se révèle être un traitement efficace. Il a été utilisé par certains propriétaires bien avant que son usage en médecine vétérinaire ne soit toléré. Pour mieux connaître les voies d'administration, les effets secondaires observés, le coût du traitement, l'implication du vétérinaire et les conséquences du traitement sur la relation entre le chat et son propriétaire, une étude prospective a été réalisée auprès de 141 propriétaires vivant aux États-Unis et ayant fait l'expérience de ce traitement pour leur chat atteint de la maladie.

Des questionnaires hebdomadaires

Les propriétaires de chats traités par le GS-441524 ont principalement été recrutés à partir de la plateforme Facebook, et la plupart avaient acheté (illégalement) le produit en ligne. L'étude s'est déroulée en 2022 et, afin d'éviter tout biais en faveur d'un résultat positif, tous les chats ont été inclus au moment du diagnostic ou au début du traitement. Les chats ont été traités par leur propriétaire pendant au moins 12 semaines avec le GS-441524.

Les participants à l'étude devaient répondre chaque semaine à une série de questions (ouvertes et à choix multiples) à propos des conditions du traitement et des conséquences sur le chat.

Soutien « important » des forums en ligne

Pour 45 % des participants, le traitement a été difficile à gérer : ils n'étaient en effet pas habitués à faire des injections et, de plus, les réactions des chats étaient extrêmement négatives. Certaines réponses aux questions ouvertes posées dans l'enquête traduisent la culpabilité et l'épuisement émotionnel des propriétaires.

Les participants ont déclaré beaucoup fréquenter des réseaux sociaux spécialisés pour obtenir des conseils sur l'attitude à adopter pendant le traitement ; presque 42 % des propriétaires ont jugé « extrêmement important » le soutien en ligne individuel dont ils ont bénéficié, et 25 % l'ont considéré « très important ».

Difficultés d'administration et effets secondaires

L'injection est douloureuse. La grande majorité des participants (71 %) a rapporté que le chat se débattait et tentait de s'échapper ; 69 % ont mentionné qu'il vocalisait pendant les injections sous-cutanées de GS-44154. Dans 17 % des cas, une personne supplémentaire était nécessaire pour assurer la contention pendant l'administration du produit.

De nombreux chats ont vite appris à se cacher au moment de l'injection. En outre, 58 % des propriétaires ont constaté que leur animal avait mal, et 55 % qu'il présentait des lésions cutanées au site d'injection. Le caractère très acide de la molécule (pH de 1,5) explique sans doute la douleur à l'injection ainsi que les lésions cutanées constatées. Une perte d'appétit pendant le traitement a également été notée dans 54 % des cas.

Certains propriétaires ont administré un sédatif pour faciliter l'administration du produit (principalement la gabapentine), mais même sédatés, les chats supportaient toujours mal les injections.

Passage à la forme orale

À cause des difficultés d'administration du GS-441524, 41 % des propriétaires ont changé de mode d'administration au cours du traitement, passant de la forme injectable à la forme orale, même si le coût était supérieur.

La façon dont les propriétaires ont découvert l'existence de la forme orale du GS-441524 n'a pas été documentée dans l'enquête. Cette présentation orale a été signalée comme étant beaucoup plus facile à administrer au chat par le propriétaire.

Un coût de traitement total dépassant 5000 €

Le coût moyen du traitement dans cette étude était de l'ordre de 3100 $ (soit environ 2950 €). Ce coût est cependant inférieur de 40 % à ce qu'il était en 2020, où il était estimé en moyenne de 4920 $ (4680 €).

Les participants ont en moyenne dépensé 2437 $ (2320 €) supplémentaires pour le suivi vétérinaire (analyses sanguines, examens cliniques et traitements complémentaires), ce qui monte la note à plus de 5000 €. Et le montant a parfois pu atteindre 20 000 $ (19 000 €). En outre, les participants ont signalé une dépense moyenne de 129 $ (122 €) pour les médicaments gaspillés à cause de mauvaises conditions de stockage ou d'injections « ratées ».

Attitudes contrastées des vétérinaires

Les vétérinaires suivant les chats traités n'ont pas été interrogés directement mais la moitié (52 %) des propriétaires a déclaré être « extrêmement satisfaite » du soutien vétérinaire reçu pendant le traitement du chat ; 17 % étaient « plutôt satisfaits », 14 % « ni satisfaits ni insatisfaits », 12 % « insatisfaits » et 4 % « extrêmement insatisfaits ».

Deux attitudes différentes des vétérinaires ont été signalées par les propriétaires : hésitation à participer au traitement, ou soutien effectif. Les participants ont précisé que leur vétérinaire craignait d'être associé à l'utilisation d'un médicament non-autorisé ou de donner l'impression de cautionner ce traitement en l'absence de sources d'informations valides à l'époque de l'étude. Les praticiens consultés ont néanmoins toujours accepté de surveiller l'état de santé du chat au cours du traitement. Les répondants ont aussi signalé que certains vétérinaires avaient changé d'avis au cours du traitement, et semblaient s'intéresser davantage à l'évolution de l'état du chat. Lorsque leur praticien habituel ne les soutenait pas, les participants ont demandé un deuxième avis vétérinaire.

Les vétérinaires qui avaient déjà eu l'occasion de suivre des chats traités par le GS-441524 ont davantage encouragé les propriétaires à poursuivre le traitement, et les ont orientés vers des forums en ligne susceptibles de leur apporter des informations utiles.

Des conséquences pour l'avenir ?

Il a été demandé aux participants si cette expérience thérapeutique particulière concernant leur chat modifierait leur tendance à consulter leur vétérinaire habituel à l'avenir :

  • 62 % ont répondu non,
  • 33 % pensent qu'ils seraient enclins à davantage le consulter à l'avenir,
  • et seulement 5 % ont répondu qu'ils le feraient probablement moins, sans doute influencés par le fait qu'ils avaient consulté un autre praticien au cours du traitement.

L'écrasante majorité des participants (98,5 %) se sont déclarés satisfaits d'avoir traité leur chat avec le GS-441524, et 98 % ont indiqué qu'ils recommanderaient probablement ce traitement à un membre de leur famille ou à un ami. À la question « seriez-vous prêt à utiliser à nouveau ce médicament pour traiter un autre chat ? », les réponses ont cependant été moins unanimes : 86,5 % ont répondu oui et 12,8 % ont répondu qu'ils n'étaient pas sûrs…