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Elanco & Proplan

27 novembre 2024

Traitement ambulatoire de l'exposition au lys : pas plus de lésions rénales, mais un taux de survie inférieur

par Caroline Driot

Temps de lecture  4 min

Feuilles, fleurs, tige : les toxines responsables des lésions rénales se retrouvent dans toute la plante de plusieurs espèces de lys. Cliché : Pixabay.
Feuilles, fleurs, tige : les toxines responsables des lésions rénales se retrouvent dans toute la plante de plusieurs espèces de lys. Cliché : Pixabay.
 

Alors que la néphrotoxicité du lys chez le chat est documentée depuis plus de 20 ans, peu de choses de la toxine responsable des lésions rénales sont connues. Si ce n'est qu'elle est hydrosoluble, et présente dans toutes les parties de la plante. Ces connaissances lacunaires empêchent la formulation de recommandations thérapeutiques claires, et reposant sur des preuves. Empiriquement, la gestion de l'intoxication au lys chez le chat repose sur des mesures visant à diminuer l'absorption de la toxine en phase précoce (lavage gastrique, vomissements provoqués, administration de charbon activé), suivies d'une fluidothérapie intraveineuse de 48 h, associée au monitoring de la fonction rénale pendant la durée de l'hospitalisation. Cependant, en raison du caractère peu coopératif de certains chats, ou du manque de moyens des propriétaires, ces mesures sont parfois inenvisageables. L'administration de fluides par voie sous-cutanée en ambulatoire représente alors une alternative thérapeutique, mais avec quelles conséquences pour l'animal ? Pour répondre à cette question, une étude rétrospective a comparé le taux de survie et la prévalence de l'insuffisance rénale aiguë (IRA), entre des chats traités en hospitalisation, et d'autres en ambulatoire.

96 chats hospitalisés et 16 en ambulatoire

Les dossiers médicaux de 179 chats, présentés entre 2011 et 2024 à l'hôpital vétérinaire de l'Université de Pennsylvanie (USA) pour une exposition au lys, avérée ou suspectée, ont été passés en revue. Les cas avérés regroupaient les chats vus en train de manger ou de lécher la plante, ou présentant du pollen sur le pelage. Les cas suspectés correspondaient aux chats présents dans une pièce avec du lys. Les patients étaient inclus dans l'étude si le délai entre l'exposition et l'admission en consultation était connu, et inférieur à 48 heures. Autres critères d'inclusion exigés : les dossiers médicaux devaient comporter au moins trois dosages de la créatininémie (un à l'admission et deux pendant le suivi), et mentionner l'issue du traitement. Finalement 112 chats ont été inclus, dont 96 traités en hospitalisation et 16 en ambulatoire. L'âge médian des patients s'élevait à 3,5 ans (de 3 mois à 19,5 ans) au sein de ce panel qui comptait 96 % d'Européens (n=108), et une majorité de chats stérilisés (97 %, n=109). Ni l'âge, ni le sexe n'étaient significativement différents entre les groupes “hospitalisation” et “ambulatoire”, mais le premier comptait plus de cas d'intoxication avérée (86,5 %, n=83), que le second (56 %, n=9).

Taux de survie élevés, malgré l'IRA

Dans le groupe “hospitalisation”, des vomissements ont été provoqués chez 35 sujets (36,5 %), dont 23 avec succès, 33 ont reçu du charbon activé (34 %), et tous ont reçu une fluidothérapie intraveineuse, avec un débit médian de 4 ml/kg/h. Dans le groupe “ambulatoire”, des vomissements ont été provoqués chez deux patients, dont un avec succès, deux patients ont reçu du charbon activé, et treize ont reçu des fluides sous-cutanés (15ml/kg). Concernant l'issue du traitement, le taux de survie variait significativement entre les deux groupes, atteignant 100 % chez les chats hospitalisés, contre 87,5 % pour ceux traités en ambulatoire. En revanche, la prévalence de l'IRA n'était pas significativement différente entre les deux groupes. Ainsi, 47 % (n=45) des chats hospitalisés ont présenté une IRA : 18 % (n=17) une IRA de grade I (créatininémie supérieure à 1,6 mg/dl, ou augmentée de 0,3mg/dl au cours du suivi), 28 % (n=27) une IRA de grade II, et 1 chat une IRA de grade III. Chez les animaux traités en ambulatoire, 44 % (n=7) ont présenté une IRA : 19 % (n=3) une IRA de grade I et 25 % (n=4) une IRA de grade II. Point important : aucun chat de la population étudiée ne présentait d'IRA de grade IV (créatininémie > 5mg/dl). Pour les auteurs, ce résultat suggère une faible prévalence des lésions rénales sévères dans les cas d'exposition au lys.

Prudence dans l'extrapolation de ces résultats

Cette étude visait également à identifier les facteurs de risque de développement d'une IRA en cas d'exposition au lys chez le chat (âge, sexe, caractère suspecté ou avéré de l'intoxication, vomissements provoqués, administration de charbon activé, fluidothérapie sous-cutanée, durée d'hospitalisation). Finalement, aucune association statistiquement significative n'a été mise en évidence. Les auteurs invitent par ailleurs à la prudence dans l'interprétation de leurs résultats. Ainsi, l'inclusion des cas d'exposition suspectée (et pas uniquement avérée), et l'exclusion des patients présentés plus de 48 heures après l'exposition au lys, a pu influencer les taux de survie, globalement excellents, observés dans les deux groupes, ainsi que l'absence de cas d'IRA de grade IV dans la population étudiée.