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4 novembre 2024
Conséquences cardiaques de l'obésité féline : réversibles en cas de perte de poids ?
Chez l'homme, l'obésité est une cause bien connue de troubles cardiovasculaire (hypertension systémique, remodelage cardiaque, dysfonctionnement systolique et diastolique). Mais une perte de poids peut inverser les processus pathologiques et limiter le risque de maladie cardiovasculaire ultérieure.
Compte tenu de la forte prévalence mondiale de l'obésité et de la cardiomyopathie hypertrophique (CMH) dans la population féline, il est intéressant d'explorer les liens potentiels entre l'excès de poids et la fonction cardiaques chez le chat.
Comme les conséquences cardiovasculaires de l'obésité féline sont mal connues, une étude prospective a été faite à l'Université de Liverpool sur une cohorte de chats obèses recrutés entre août 2016 et novembre 2018. Vingt chats européens ont été inclus : 8 femelles et 12 mâles, tous stérilisés, âgés de 7,4 ans en médiane au début de l'étude, et ne présentant pas de signes significatifs de maladie cardiaque ou systémique lors des examens cliniques initiaux.
Le poids médian des chats au départ était de 7,2 kg, avec une note d'état corporel (NEC) médiane de 8/9. Leur composition corporelle a été analysée par la technique d'absorptiométrie à rayons X à double énergie (DEXA).
Un dépistage des troubles cardiovasculaires potentiels a été réalisé chez tous les chats avant de vérifier si une perte de poids contrôlée permettait d'observer l'amélioration de certains paramètres au fur et à mesure que la composition corporelle se modifiait.
Ce bilan cardiovasculaire incluait des examens échocardiographiques, la mesure de la pression artérielle systolique, une électrocardiographie et le dosage des biomarqueurs cardiaques plasmatiques. Tous ces examens ont été effectués au début de l'étude chez les 20 chats obèses, et répétés chez les 11 chats ayant atteint leur poids cible à la fin de l'étude, en novembre 2019.
Les données fournis par la DEXA ont permis de bâtir des programmes individualisés de perte de poids, en fixant à la fois un poids idéal et un poids cible. L'objectif était en effet que la perte de poids soit bénéfique à la santé des chats, même si certains étaient encore en surpoids à la fin de l'étude.
Différents aliments thérapeutiques, secs et humides, ont été distribués pendant la période de perte de poids, le choix étant laissé aux propriétaires des chats. Le rationnement journalier était calculé à partir du besoin énergétique correspondant au poids idéal. Des ajustements ont été faits lors des pesées, effectuées toutes les 2 à 4 semaines.
Chez les chats ayant atteint le poids cible, le pourcentage médian de perte de poids est de 26 % (17-29 %), et la réduction médiane de la masse grasse de 45 % (26-64 %).
Dans cette étude, l'échocardiographie réalisée chez les chats obèses a fréquemment montré une augmentation de l'épaisseur maximale de la paroi libre du ventricule gauche (EPVG) et un dysfonctionnement diastolique. Une amélioration a été observée après la perte de poids, ce qui suggère que ces changements pourraient être réversibles.
Une hypertrophie ventriculaire gauche est fréquemment associée à l'obésité chez l'homme ; le remodelage myocardique est notamment dû aux modifications de la précharge et de la postcharge. Dans la présente étude, chez 11 chats sur 20, l'EPVG était égale ou supérieure à 6 mm, ce qui correspond à un phénotype de CMH.
Au sein de la population féline, la prévalence de la CMH subclinique est d'environ 14,7 %, et il est possible que certains chats de l'étude présentaient une CMH subclinique. Cependant, s'il s'agissait de la seule cause de l'hypertrophie cardiaque, celle-ci ne devrait pas s'améliorer avec le temps. Or, chez les chats ayant atteint leur poids cible, une réduction significative de l'EPVG médiane (-14,0 %) et de l'épaisseur du septum interventriculaire (-7,9 %) en fin de diastole a été constatée. Ces modifications, bien que faibles (de 0,50 à 0,85 mm), sont cliniquement pertinentes si l'on considère qu'un tel changement peut faire la différence entre un chat sain ou un phénotype de CMH.
En médecine humaine, ce type de résultat est attribué à une réduction de la postcharge, secondaire à une baisse de l'hypertension systémique. Cette affection ayant été exclue chez les chats de cette étude, d'autres facteurs sont probablement impliqués dans ce phénomène de remodelage inverse, dont une diminution de l'accumulation de lipides dans les cardiomyocytes.
Chez l'homme et le chien, l'obésité s'accompagne souvent de dysfonctionnements diastoliques, entraînant un risque accru d'insuffisance cardiaque. Dans cette étude chez le chat, des signes échocardiographiques de dysfonctionnement diastolique (relaxation altérée) ont été constatés chez 15 individus, mais une amélioration de la fonction diastolique a été constatée après la perte de poids.
Le développement d'un dysfonctionnement diastolique est multifactoriel et dans d'autres espèces, l'âge et la pression artérielle systolique peuvent notamment être impliqués. La population féline étudiée ici comprenait plutôt de jeunes chats chez lesquels un dysfonctionnement diastolique n'était pas attendu. Les auteurs ont donc conclu que l'obésité était une cause plus probable que l'âge.
La présence d'une CMH pourrait aussi avoir provoqué un dysfonctionnement diastolique mais comme une amélioration fonctionnelle a été constatée après l'amaigrissement, l'obésité reste la cause la plus probable des troubles diastoliques.
Chez l'homme, l'obésité est couramment associée à une augmentation de la fréquence cardiaque. Ici, il n'a pas été observé de changement dans la fréquence cardiaque ou sa variabilité chez le chat. Ces paramètres sont cependant difficiles à mesurer de manière fiable chez des animaux présentés en consultation vétérinaire. L'utilisation d'un ECG ambulatoire pourrait être un meilleur moyen d'évaluer l'influence de la condition corporelle sur la fréquence cardiaque des chats.
Par ailleurs, les biomarqueurs cardiaques sont restés dans l'intervalle de référence pour tous les chats sauf 2, sans changement significatif après la réduction de poids. L'augmentation de l'EPVG n'aurait donc pas provoqué de lésions myocardiques cliniquement significatives. L'étude incluait cependant un faible nombre de chats, et des changements subtils du fonctionnement cardiaque ont pu passer inaperçus.
Ainsi, l'échocardiographie met fréquemment en évidence une augmentation de l'épaisseur de la paroi du ventricule gauche et un dysfonctionnement diastolique chez les chats obèses, des modifications qui pourraient orienter vers un diagnostic de CMH féline. Des études supplémentaires restent nécessaires pour comprendre si l'obésité doit être considérée comme une phénocopie de la CMH, ou si l'obésité agit comme un modificateur de la pénétrance et de l'expression de la CMH chez les chats.
Les changements constatés peuvent cependant être réversibles si le chat perd de la masse grasse, ce qui souligne l'importance de bien contrôler le poids des chats au cours de leur vie.
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