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Elanco & Proplan

6 janvier 2025

Détection d'un souffle cardiaque chez un chiot : enquête sur l'attitude des vétérinaires

par Pascale Pibot

Temps de lecture  5 min

La détection d'un souffle cardiaque chez un chiot doit être suivie d'examens complémentaires afin de ne pas passer à côté d'une cardiopathie congénitale (cliché Pixabay).
La détection d'un souffle cardiaque chez un chiot doit être suivie d'examens complémentaires afin de ne pas passer à côté d'une cardiopathie congénitale (cliché Pixabay).
 

Le premier examen vétérinaire d'un chiot met parfois en évidence la présence d'un souffle cardiaque. Celui-ci peut être le signe d'une maladie cardiaque congénitale, mais il s'agit plus souvent d'un souffle dit innocent (anorganique). Distinguer un souffle innocent d'un souffle pathologique peut se révéler difficile ; cela doit pourtant être fait le plus tôt possible, dans l'intérêt du chiot, de l'éleveur et du futur propriétaire si le chiot n'est pas encore vendu.

Des scientifiques néerlandais ont cherché à savoir si la distinction est facilement faite par les vétérinaires praticiens, et comment ils prennent en charge les chiots présentant un souffle pathologique.

Une enquête menée au Pays-Bas et en Belgique

L'étude a été conduite en 2021 : les chercheurs ont analysé les réponses à un questionnaire en ligne envoyé à des vétérinaires néerlandais et belges. L'enquête comprenait des questions de plusieurs types (questions ouvertes, QCM, questions avec une barre de défilement pour quantifier la réponse, questions pour évaluer le taux d'accord avec une déclaration…). Sur 524 questionnaires renvoyés, 452 ont pu être analysés.

Parmi les répondants, 3 % pratiquent en Belgique et 97 % aux Pays-Bas (ils représentent 13 % des praticiens canins de ce pays) ; 82 % des praticiens ayant participé à l'enquête exercent exclusivement avec des animaux de compagnie. Leur nombre d'années d'expérience professionnelle se répartit comme suit : 0-5 ans (29 %), 6-15 ans (38 %) et plus de 15 ans (33 %).

Identifier les souffles ?

La plupart des répondants (96 %) savent qu'une croissance normale et l'absence de signes cliniques pendant les premiers mois ou les premières années de vie d'un chiot n'excluent pas une cardiopathie congénitale grave. C'est pourquoi l'auscultation cardiaque à chaque visite est de la plus haute importance.

Un souffle innocent est toujours doux, court, localisé dans la région basale du cœur gauche, entendu lors de la systole et a un caractère musical (décrit comme vibratoire). La distinction avec un souffle pathologique requiert cependant une formation et une expérience suffisantes. Dans cette étude, 88 % des vétérinaires interrogés estiment qu'il est facile de détecter un souffle cardiaque chez un chiot mais 9 % seulement distinguent facilement un souffle innocent d'un souffle pathologique.

Disposant sans doute d'une formation plus poussée sur le sujet, les vétérinaires les plus jeunes (moins de 5 ans de pratique) sont plus confiants que les plus anciens (>15 ans) pour faire cette distinction chez un chiot : les taux de confiance respectifs sont de 44 et 28 %.

Des examens complémentaires ?

En cas de détection d'un souffle cardiaque important (donc potentiellement pathologique) lors du premier examen de santé du chiot, plus de 80 % des praticiens interrogés recommandent la réalisation d'un examen complémentaire, en général une échocardiographie. Les moins expérimentés (<5 ans) sont cependant plus enclins à le faire que les plus expérimentés (>15 ans) : 91 vs 62 %.

L'enquête n'explore cependant pas le conseil qui serait donné au propriétaire en cas de détection d'un souffle systolique doux, qui pourrait également être pathologique. De plus, un souffle causé par une sténose sous-aortique s'amplifie au fur et à mesure que le chiot grandit.

Référer ou non ?

Si 43 % des répondants adressent un chiot présentant un souffle cardiaque à un spécialiste en cardiologie vétérinaire, les autres l'orientent vers un spécialiste en imagerie (21 %), une structure où l'échocardiographie est pratiquée (16 %), un confrère de la même clinique qui pratique l'échocardiographie (10 %), un service d'échographie mobile (5 %) ou pratiquent eux-mêmes l'échocardiographie (5 %).

Les vétérinaires qui affirment différencier facilement les souffles innocents des souffles pathologiques réalisent plus souvent l'échocardiographie eux-mêmes (15 %) que les vétérinaires qui reconnaissent avoir du mal à les distinguer (dont seuls 4 % réalisent l'échocardiographie eux-mêmes). Les seconds sont plus nombreux à référer le cas à un cardiologue vétérinaire que les premiers (45 vs 30 %).

La plupart des répondants estiment que leurs connaissances en cardiologie sont suffisantes pour prendre en charge ces chiots. Pourtant, 64 % des personnes interrogées voient seulement 1 à 4 cas par an de ce type, un nombre jugé insuffisant pour acquérir une bonne expérience en matière de prise en charge des maladies cardiaques congénitales. Les bonnes pratiques vétérinaires consistent à référer le plus tôt possible un chiot présentant une cardiopathie congénitale potentielle à un expert pour des examens complémentaires.

Améliorer ses compétences ?

Le rôle positif de la formation continue pour aider à diagnostiquer un souffle cardiaque chez un chien a été mis en évidence. En effet, les répondants qui ne se forment pas trouvent le diagnostic plus difficile que ceux qui consacrent du temps à leur formation continue.

Dans cette enquête, les participants ont été interrogés à propos de leurs souhaits en matière de formation en cardiologie. Aucun d'entre eux ne souhaitait suivre une formation à l'auscultation cardiaque mais 36 % souhaitaient se former en échocardiographie.

Ces résultats montrent que le rôle de l'examen clinique a perdu de son importance en médecine des petits animaux alors que l'auscultation est plus rapide et plus pratique pour détecter une maladie cardiaque. Sous la direction d'un spécialiste, apprendre à distinguer un souffle innocent d'un souffle pathologique peut se faire en quelques heures, selon les auteurs de l'étude.

Savoir apprécier l'intensité d'un souffle est très utile car ce paramètre est corrélé à la gravité de la maladie, notamment lors de persistance du canal artériel et de sténose pulmonaire ou aortique chez le chien. Classer à tort un souffle fort comme un souffle faible risque de faire passer à côté de maladies cardiaques congénitales.

Traiter précocement ?

Un chiot atteint d'une cardiopathie congénitale grave doit pouvoir bénéficier d'une éventuelle intervention avant l'apparition d'un remodelage cardiaque et de signes cliniques.

Selon 87 % des vétérinaires interrogées, une intervention médicale ou chirurgicale est en effet nécessaire pour un chiot présumé atteint d'une cardiopathie congénitale, même en l'absence de signes cliniques. Et pour 62 % des répondants, plus le chiot est jeune au moment de l'intervention, meilleurs sont les résultats. Le taux d'adhésion à ces affirmations est d'autant plus fort que le praticien travaille dans une grande structure vétérinaire, qu'il trouve facile de différencier les souffles innocents des souffles pathologiques, et qu'il a moins de 5 ans d'expérience.

Selon cette enquête, les praticiens exerçant au sein de grosses cliniques vétérinaires prennent en charge les maladies cardiaques des chiots de manière plus proactive que dans les structures de taille réduite. Cela s'explique sans doute par le recours plus facile à des spécialistes, par un meilleur accès à des outils diagnostiques avancés et par la formation continue suivie. En outre, les propriétaires de chiens qui fréquentent les grandes structures peuvent être plus exigeants à propos du pronostic de la cardiopathie.