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Elanco & Proplan

3 janvier 2025

Émergence : des cas sévères du syndrome neurologique du “loup-garou” observé chez les chiens de plusieurs pays d'Europe

par Karin De Lange

Temps de lecture  6 min

Les cas de syndrome “du loup garou” observés chez des chiens en lien avec une suspicion d'intoxication liée à la consommation de certains os à mâcher présentent des signes neurologiques sévères et spectaculaires (images issues de la capture d'écran de vidéos mises en ligne à titre d'information par la faculté vétérinaire de Hanovre, Allemagne - https://ibei.tiho-hannover.de/survey/epunver).
Les cas de syndrome “du loup garou” observés chez des chiens en lien avec une suspicion d'intoxication liée à la consommation de certains os à mâcher présentent des signes neurologiques sévères et spectaculaires (images issues de la capture d'écran de vidéos mises en ligne à titre d'information par la faculté vétérinaire de Hanovre, Allemagne - https://ibei.tiho-hannover.de/survey/epunver).
 

Au cours des derniers mois de 2024, des dizaines de cas du soi-disant syndrome du “loup-garou” ont été observés chez des chiens de compagnie par des vétérinaires de plusieurs pays européens. Ce syndrome neurologique se caractérise par de spectaculaires changements de comportement qui ressemblent à une épisode psychotique, une agitation, des hurlements et parfois des crises d'épilepsie généralisées. Les premiers signes sont une excitation soudaine et extrême, des attaques de panique avec hurlements, de l'agitation et des tentatives d'évasion par les portes ou les fenêtres. En l'absence de dispositif d'épidémiosurveillance de la santé des animaux de compagnie en Europe, la présente synthèse repose majoritairement sur les données de réseaux sociaux de praticiens et de spécialistes vétérinaires en neurologie.

Tableau clinique extrême

À la mi-décembre, l'Allemagne avait recensé environ 45 cas de ce type, explique la neurologue vétérinaire Nina Meyerhoff (faculté vétérinaire de Hanovre) dans Web.de. « Malheureusement, il n'existe pas de plateforme centrale de notification pour ces cas, et le nombre exact n'est pas connu. De nombreux cas peuvent avoir été présentés à des praticiens généralistes ou à des comportementalistes ». Et l'augmentation inhabituelle de ces manifestations n'a été remarquée qu'au mois d'août, ce qui signifie que le nombre réel pourrait être nettement plus élevé. Bien que la prévalence puisse sembler relativement mineure – 45 cas pour 10 millions de chiens allemands – le tableau clinique ne l'est pas. « Ces épisodes sont vraiment extrêmes. Les chiens semblent halluciner, précise la spécialiste. Certains essaient de sauter par la fenêtre, d'autres attaquent soudainement leurs propriétaires. Ils peuvent devenir incontrôlables ». En raison de ces graves changements de comportement, les chiens ne peuvent souvent plus être gardés à la maison et doivent être hospitalisés. Le syndrome peut durer plusieurs jours à plusieurs semaines. Les signes cliniques se reproduisent de manière épisodique et semblent être déclenchés par une excitation telle que l'heure du repas, la sortie ou une rencontre avec un autre chien. À la faculté vétérinaire de Hanovre, les chiens sont traités avec des sédatifs et des anxiolytiques, ainsi qu'avec des antiépileptiques en cas de convulsions. « Il est essentiel que les chiens soient vus par un vétérinaire spécialisé en neurologie dès les premiers stades, afin d'exclure d'autres maladies ». Une fois sortis de l'hôpital, les chiens montrent une amélioration progressive, mais ils peuvent rechuter à la maison et souvent, plusieurs chiens d'un même foyer sont affectés.

Suspicion des os et bâtonnets en peau de bœuf

De nombreuses rumeurs circulent chez les propriétaires, pouvant aller jusqu'à incriminer la vaccination et le traitement contre les tiques, mais au vu de l'enquête épidémiologique en cours, « ces deux causes ont été exclues », poursuit la Dre Meyerhoff. Une intoxication semble la cause la plus probable. Actuellement, la suspicion la plus probable se porte sur des os à mâcher, car l'enquête a montré que les chiens présentés à Hanovre avaient tous “consommé” de tels produits en peau de bœuf pressée. Il n'est pas inconcevable qu'au cours du processus de production, il y ait eu une contamination accidentelle par certains désinfectants ou des mycotoxines, note la Dre Meyerhoff. Signe de l'ampleur européenne de cette alerte sanitaire, le 31 décembre, l'Autorité néerlandaise de la sécurité alimentaire (NVWA) a émis un avertissement contre les os en peau de bœuf (29 cm) et les bâtonnets à mâcher noués (11 cm) de la marque Barkoo, « causes probables de signes neurologiques graves chez les chiens ». Une mise à jour du 2 janvier a ajouté deux autres produits en peau bœuf pressé, des bâtonnets nouées à la spiruline (12 cm) et des os à mâcher noués (24 cm), également de Barkoo. Les produits Barkoo sont distribués par la société allemande Matina (son site web est actuellement inaccessible) et vendus via des boutiques en ligne telles que Zooplus. Normalement, une entreprise est responsable de l'émission de ses propres avertissements de sécurité, mais comme le produit est allemand, les autorités néerlandaises ont décidé d'émettre l'avertissement à leur place. Dibevo, l'organisation néerlandaise regroupant la filière des fournisseurs pour animaux de compagnie, souligne que la spiruline est un « complément alimentaire inoffensif et que cette substance n'est pas nocive pour les chiens ».

Et dans les autres pays ?

  • En Suisse, le neurologue vétérinaire Frank Steffen (université de Zurich), a déclaré à galaxus.be : « nous avons vu un total de six cas en Suisse, soit vus par notre service soit renseignés par des vétérinaires consultants ». Chez quatre de ces animaux, le lien avec les os à mâcher « semble être tout à fait certain, et chez les deux autres, il est au moins très évident ».
  • En Belgique, le neurologue vétérinaire Dakir Polidoro (Anicura Berchem) a observé deux cas comparables jusqu'à présent. Dans l'un de ses posts LinkedIn, il partage une vidéo de l'un de ces cas. « Il est recommandé de garder les chiens dans un environnement calme et de les sortir pour des promenades la nuit plutôt que pendant la journée », a-t-il confirmé sur les réseaux sociaux.
  • Aux Pays-Bas, IVC Evidensia a publié un article sur LinkedIn à la mi-décembre indiquant que ses « spécialistes en neurologie vétérinaire ont vu plusieurs cas de chiens présentant un comportement psychotique et des crises d'épilepsie. Il semble que tous les patients aient eu des os à mâcher en peau de bœuf. Après que les propriétaires ont cessé de donner ces os à mâcher, les signes ont progressivement disparu. Malheureusement, certains chiens ont dû être euthanasiés. Nous exhortons les vétérinaires à nous alerter s'ils voient des chiens avec des signes similaires - et à demander aux propriétaires de garder l'emballage de tout os en peau de bœuf donné à leur animal, afin qu'il puisse être signalé à la NVWA ».
  • En France, le neurologue Vincent Mayousse (CHV des Cordeliers) a annoncé dans un commentaire à un post LinkedIn qu'il avait vu trois cas similaires, ces chiens appartenant à un même foyer.
  • Minna Rinkinen, clinicienne sénior en médecine interne des petits animaux à Evidensia et à l'Université d'Helsinki (Finlande), a déclaré qu'elle avait été témoin d'une émergence similaire en août et septembre dans son pays et que le rappel des os à mâcher avait alors mis fin au phénomène.

Questionnaire pour propriétaires

Pour améliorer la connaissance de ce syndrome, un questionnaire en ligne destiné aux propriétaires de chiens a été mis en place par la faculté vétérinaire de Hanovre. Il est en libre accès, et bien que rédigé en allemand, il est facile à compléter à l'aide d'un outil de traduction en ligne. Les propriétaires de chiens atteints sont invités à participer à l'étude « afin de contribuer à la comparaison des chiens atteints et des chiens non atteints et d'aider à identifier les causes ou les facteurs de risque possibles ». Le questionnaire prend environ 20 minutes à compléter et comprend trois courtes vidéos décrivant des cas. Et en cas de suspicion, les propriétaires d'animaux sont encouragés à demander l'avis d'un vétérinaire spécialisé en neurologie. Tant que la suspicion liée aux os à mâcher en peau de bœuf ne sera pas confirmée ou infirmée, la Dre Meyerhoff recommande de ne pas donner d'os à mâcher aux chiens, « par précaution. Donnez-leur plutôt des carottes ».