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Elanco & Proplan

31 mars 2025

Changement d'heure : des chiens peu perturbés dans leur quotidien

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Les chiens de traîneau ont mis un jour à s'adapter à l'horaire décalé de l'arrivée du handler, à 7h30 heure légale (cliché Pixabay).
Les chiens de traîneau ont mis un jour à s'adapter à l'horaire décalé de l'arrivée du handler, à 7h30 heure légale (cliché Pixabay).
 

Nous avons « perdu » une heure hier. Avec des effets délétères sur notre sommeil, notre activité, notre humeur, bref, notre « bien-être ». Diverses études scientifiques ont effectivement évalué les conséquences chez l'homme de ces changements biannuels (qualité de sommeil et comportement).

Et les chiens alors ? C'est pour le savoir qu'une étude a été menée par des chercheurs canadiens (Université de Toronto). Ses résultats, publiés en libre accès dans la revue en ligne PLoS ONE, montrent que les effets restent limités, chez des chiens de compagnie comme des chiens de travail.

Chiens de travail et chiens de loisir

L'objectif de cette étude était de caractériser les conséquences du changement d'heure – plus exactement du changement des activités humaines qui en découle – sur l'activité matinale des chiens. Elle a inclus 25 chiens de traîneau et 29 chiens de compagnie (husky ou malamute pour éviter l'effet race), tous équipés d'un accéléromètre (fixé au collier), de même que leur propriétaire (dispositif porté au poignet). Les participants actionnaient un bouton de leur montre lorsqu'ils allaient se coucher puis lorsqu'ils se levaient. Les chiens très âgés (plus de 13 ans), ou dont une maladie ou un traitement était susceptible d'interférer sur l'activité, étaient exclus.

Les enregistrements au moment du changement d'heure d'automne – moyenne sur les quelques jours précédents puis quotidiennement durant les 3 jours suivants – ont été analysés :

  • Activité autour du lever du soleil, restant naturellement inchangé ;
  • Activité autour de l'arrivée du handler (à 7h30) ou du lever du maître, décalé(e) donc d'une heure.

Les auteurs avaient anticipé des modifications plus nettes et identiques chez les chiens de travail, dont le quotidien est rythmé par des horaires rigides, et une plus grande variabilité chez les chiens de compagnie, dont les routines matinales sont plus inconstantes, selon les habitudes de leur maître (un lever plus tardif le week-end notamment).

Adaptation rapide des chiens de traîneau

Chez les chiens de traîneau, l'arrivée du handler coïncidait initialement avec le lever du soleil. Elle survenait une heure plus tard après le changement d'horaire, ce qui a entraîné une baisse d'activité significative des chiens au moment du lever de soleil, lequel influence donc peu cette activité de manière directe. D'autres études ont montré que le cycle d'activité des chiens domestiques s'aligne avec les activités humaines plutôt que selon des variables endogènes dépendantes de l'environnement, notamment de la lumière.

Le dimanche du changement (premier jour), les chiens ont été significativement plus actifs avant l'arrivée du handler, qu'ils « attendaient » probablement. Mais cela ne s'est pas reproduit les jours suivants.

Un seul jour a donc été suffisant pour l'adaptation chez ces chiens. Il est possible que l'adaptabilité des chiens soit favorisée par des cycles de sommeil plus courts que chez l'homme. L'effet de groupe pour des chiens vivant en meute pourrait aussi entraîner une synchronisation rapide (ce qui a été observée par ailleurs chez la souris ou le ouistiti). Des travaux chez d'autres catégories de chiens de travail (détecteurs de drogues) ont également montré un délai d'adaptation de 24 heures lors du retour après une période de repos.

C'est court : les études chez l'homme montrent que l'adaptation peut demander jusqu'à une semaine. Et des difficultés particulières sont observées chez les personnes au chronotype extrême (lève-tôt ou lève tard) ainsi que celles présentant déjà des troubles du sommeil. En outre, une augmentation du nombre d'accidents mortels de la route suit chacun des changements, probablement en lien avec le manque de sommeil des conducteurs, le matin lors du changement de printemps (dans l'hémisphère nord), et le soir lors du changement d'automne lorsque les conducteurs l'anticipent profitent une heure de plus de la soirée précédente.

Peu de changement chez le chien de compagnie

Chez les chiens de compagnie, l'activité au lever du soleil est restée égale. La grande majorité de ces chiens dormait dans l'habitation.

Concernant leur activité au lever du maître, aucun changement significatif n'a été observé le dimanche. Mais la plupart des participants n'avaient pas modifié leurs habitudes ; ils se sont naturellement levés à la même heure solaire. C'est une riche idée de changer un dimanche, cela procure un délai d'adaptation de 24 heures.

Les deux jours suivants (en semaine donc), les propriétaires se sont levés artificiellement plus tôt relativement à l'heure légale (leur horloge biologique interne ne s'étant pas synchronisée à celle de leur réveil-matin), et cela n'a pas entraîné de changement significatif de l'activité de leurs chiens. Les auteurs en concluent aussi que le chien ne dirige pas (dans ce groupe) l'heure de réveil de son maître.

Les auteurs avaient anticipé davantage de diversité chez les chiens de compagnie, mais il est possible que la présence d'autres personnes dans le foyer, avec d'éventuelles heures de lever variables, ait biaisé les résultats. Une synchronie plus étroite entre les activités du chien et du maître était attendue également. Mais les lieux de couchage pouvaient être suffisamment éloignés dans l'habitation pour éviter les interruptions de sommeil, dans un sens comme dans l'autre.

De l'ensemble de leurs observations, les auteurs concluent qu'il est important de conserver des routines flexibles vis-à-vis des chiens, et d'éviter des changements brusques au profit de changements progressifs, pour une meilleure habituation des animaux.

Des études seraient intéressantes à mener toutefois dans d'autres races de chiens, et au moment du changement de printemps dont les effets sont inversés sur le lever des propriétaires.

Un effet de l'âge du chien

Les auteurs de l'étude ont également analysé l'influence de l'âge et du sexe des chiens sur leur activité et son évolution, ainsi que celle de la présence d'autres animaux dans l'habitation pour les chiens de compagnie.

Les résultats montrent que seul l'âge interfère :

  • les chiens de traîneau les plus âgés sont moins actifs à l'arrivée du handler indépendamment du changement d'heure,
  • les chiens de compagnie les plus âgés se sont révélés moins actifs au réveil de leur maître le dimanche du changement.

Ces constats inattendus peinent à être expliqués en dehors d'un niveau d'activité naturellement plus faible chez le chien plus âgé, et d'une moindre réactivité à la présence humaine dans le cas des chiens de traîneau. Les auteurs recommandent toutefois d'éviter les changements brusques dans l'environnement et le quotidien de ces chiens, ce qui s'entend pour tout sénior, homme comme animal.