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Elanco & Proplan

2 juin 2016

Garder la ligne : le secret de la longévité (> 15 ans) des Labradors

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Ces auteurs ont analysé les données d’un suivi de cohorte de Labradors. Ils montrent que le maintien d’une masse musculaire constante sur toute la vie des chiens, et d’une augmentation limitée de la masse graisseuse sont significativement associés à une longévité exceptionnelle des animaux (cliché Wikimedia).
Ces auteurs ont analysé les données d’un suivi de cohorte de Labradors. Ils montrent que le maintien d’une masse musculaire constante sur toute la vie des chiens, et d’une augmentation limitée de la masse graisseuse sont significativement associés à une longévité exceptionnelle des animaux (cliché Wikimedia).
 

Aux USA, « 58 % des chats et 54 % des chiens sont en surpoids ou obèses » vient de publier l'association américaine pour la prévention de l'obésité des animaux de compagnie, qui lance un appel à l'Association de médecine vétérinaire américaine pour qu'elle reconnaisse l'obésité comme une maladie. Une étude sur le lien entre nutrition, état général et longévité vient, pour les Labradors, enfoncer le clou. Elle commence par répondre à la question "quelle est l'espérance de vie d’un Labrador ?" L'équipe d’épidémiologistes et universitaires vétérinaires britanniques qui répond a exploré les bases de données et publications disponibles entre 1999 et 2013, et a rassemblé des praticiens et des experts; ils ont estimé que « l’espérance de vie moyenne d’un Labrador retriever est de 12 ans ». Et, se fondant sur une définition antérieure, ils rappellent qu'une longévité exceptionnelle est une durée de vie excédant de 30 % au moins l'espérance de vie. Donc dépassant les 16 ans pour un Labrador.

Suivi de cohorte

Une cohorte de 59 Labradors a été constituée en 2003, dans le cadre d’un essai clinique avec un complément nutritionnel mimant une restriction énergétique (mannoheptulose). L’essai a été réalisé aux USA dans sa totalité ; son analyse outre-Manche et en Suisse. Ces chiens ont reçu une alimentation témoin pendant 15 mois, puis ont été assignés à trois groupes : un recevant l’aliment témoin (n=20), un autre recevant une alimentation adaptée à l’entretien des chiens séniors (n=20) et un dernier recevant l’alimentation sénior et le supplément testé (< 0,1 %, n=19). Le premier groupe a été retiré de la cohorte car ensuite engagé dans d’autres essais. Les deux autres groupes ont fait l’objet du suivi longitudinal jusqu’en juin 2013. Au terme de ces 9 annés de suivi, il n’y avait pas de différence significative d’effet de l’aliment sur la longévité des chiens. Les auteurs ont donc choisi de fusionner les deux groupes restants et de s’intéresser aux facteurs pouvant expliquer les différences individuelles de longévité.

Note d'état de 2 à 4

L’analyse statistique porte donc sur les 39 chiens, tous stérilisés (27 femelles et 12 mâles), qui avaient entre 5,3 et 8,5 ans au moment de l’entrée dans l’étude (à la fin de l'adaptation). Ils avaient tous été achetés à des éleveurs, et disposaient d’un suivi médical de qualité. Outre les soins et activités régulières pendant l'étude, ces chiens ont fait l’objet d’une pesée toutes les deux semaines et d’une notation trimestrielle de leur état général, sur une échelle de 1 (maigreur) à 5 (obésité). Leur composition corporelle était évaluée une fois par an. Tous les chiens de l’étude ont été maintenus avec une note d’état comprise entre 2 et 4, sur toute la durée de celle-ci. Ils recevaient une ration pesée de l’aliment, adaptée à leur poids vif (entre 46,2 et 48 kcal/kg/j), et réévaluée tous les trimestres au gré de leur note d’état général (50 g d'aliment en plus ou en moins). Les 39 chiens ont donc été classés a posteriori en trois groupes :

  • Les 13 chiens qui ont eu une longévité attendue (9 à 12,9 ans) ;
  • les 15 chiens à longévité prolongée (13 à 15,5 ans) et
  • les 11chiens à longévité exceptionnelle (15,6 ans et plus), qui ont vécu significativement plus vieux que les autres (p<0,01). En particulier, 5 chiens étaient encore vivants à la fin de l’étude. Ils étaient alors âgés de 16 à 17 ans et étaient « pleins de vie, actifs, sociaux »

Masse graisseuse

Ainsi, 90 % des chiens de l’étude ont vécu plus longtemps que la longévité attendue pour cette race. Et plus du quart de l’effectif (28 %) a atteint une longévité exceptionnelle. Les auteurs n’identifient pas d’effet significatif du sexe, ni de l’âge à la castration, sur cette longévité. Dans les trois groupes, les Labradors ont pris du poids régulièrement jusque 9 ans d’âge, sans différence significative. En revanche, sur la période des 9-13 ans, seuls les chiens qui auront une longévité exceptionnelle ont poursuivi la prise de poids (+530 g/an), ce qui est significativement plus élevé que les chiens à longévité prolongée (-910 g/an), mais pas significativement différent des chiens à longévité attendue (-150 g/an). La masse graisseuse totale augmente chez tous les chiens jusque 13 ans. En revanche, cette accumulation se fait 3,1 fois plus vite chez les chiens à durée de vie attendue que chez ceux à longévité exceptionnelle (p=0,003). La différence est également significative pour la proportion de masse graisseuse (voir le tableau ci-dessous). À l'inverse, la masse musculaire se réduit significativement moins vite chez les chiens à durée de vie exceptionnelle que chez les autres.

Évolutions annuelles de la composition corporelle des Labradors du suivi de cohorte, à partir d'une mesure annuelle. a,b : différence significative (p<0,05) entre deux valeurs d’une même ligne partageant la même lettre (d'après Adams et coll., 2016).

Restriction calorique

Les auteurs attribuent ces effets - pour une large part - à la nature de l'aliment testé, qui correspondait à une restriction calorique. Ils concluent que « l’identification d’un équilibre calorique approprié afin d’atteindre et de maintenir une note d’état corporel idéale sur la totalité de l’espérance de vie des Labradors retrievers, en observant ces niveaux alimentaires, pourrait être essentiel pour atteindre une longue durée de vie en bonne santé ». Il reste qu’un facteur génétique existe pour la longévité (héritabilité de l’ordre de 0,3) et que la nutrition n'est que l’un des facteurs favorisants.