19 février 2025

Gallup, société d'analyses et de conseil, vient de publier son rapport annuel sur l'engagement des salariés dans le monde (rapport 2024 sur les chiffres de 2023). Ce rapport est la référence mondiale pour évaluer l'implication des salariés dans leur activité professionnelle. Il se base sur l'étude d'un échantillon de 3,3 millions de salariés.

Trois catégories d'engagement

L'engagement est défini par l'état d'esprit des salariés qui aiment leur travail, qui considèrent que celui-ci a du sens pour eux et que leur environnement de travail est agréable. Il s'oppose au désengagement, caractérisé par des salariés qui n'ont pas de réelle motivation dans leur travail, ils viennent gagner leur vie et c'est tout. Enfin, la 3^e catégorie dite des salariés « activement désengagés » correspond à ceux qui non seulement n'ont pas de motivation à venir travailler, mais qui, en plus, sont tellement frustrés et insatisfaits par leur travail et les conditions dans lesquelles ils le font, qu'ils sont capables de contaminer négativement leurs collaborateurs.

Au niveau mondial, les calculs de Gallup conduisent à estimer l'impact financier du manque d'engagement à 8,9 billions de dollars (soit 8,9 milliers de milliards de dollars) par an !

Un manque d'engagement variable suivant les pays

À partir de différentes données exploitées dans une combinatoire secrète de Gallup et fournies sur des moyennes de 3 années consécutives, le rapport conclut que l'engagement en 2023 concerne 23 % des salariés dans le monde ; 62 % des participants sont non engagés et 15 % activement désengagés. Ces valeurs moyennes mondiales cachent comme chaque année de grandes disparités. Les plus engagés sont les salariés américains et les canadiens, engagés pour 33 % d'entre eux. À l'autre bout de l'échelle se trouvent les pays européens, avec en moyenne 13 % de salariés engagés.

Cette moyenne faible masque en réalité des différences significatives entre les pays européens : de 22,7 % de salariés engagés pour la Suède ou 20,8 % pour la Norvège jusqu'à 9 % pour l'Espagne et 8,4 % pour l'Italie, en passant par 14,5 % pour l'Allemagne. La France ferme la marche des pays européens majeurs avec un taux d'engagement de 7 % seulement. Le Japon est moins engagé que la France, avec un taux moyen d'engagement évalué à 5,9 %.

Dans notre pays, le taux de désengagement atteint 74,8 %, soit 12 points de plus que la moyenne mondiale (de 62 %). Pour les salariés activement désengagés, le taux français est de 18,2 % (contre 15 % au niveau mondial), soit 2,5 fois plus que le taux de salariés engagés (voir schéma 1 en illustration principale).

Stabilisation de la situation en France

L'intérêt de ce rapport, reconduit tous les ans, est également d'obtenir un suivi dans le temps de ces données.

Certains pays, comme les États-Unis et l'Allemagne, présentent un taux relativement stable du niveau d'engagement depuis 2010. Les pays d'Europe du Nord sont en progression régulière (évolution de 14,8 à 22,7 % en Suède et de 15,4 à 20,8 % en Norvège entre 2010 et 2023). D'autres pays régressent régulièrement à l'exemple de la Grande Bretagne, pour laquelle le taux d'engagement est de 9,9 % en 2023 en ayant perdu environ 1 à 2 points tous les 3 ans depuis plus de 10 ans.

En France, sur ces dernières années, le taux d'engagement le plus bas a été constaté sur la période 2015 à 2017 avec une valeur plancher à 5,2 % et une perte brutale de 5 points par rapport à période précédente (voir schéma 2 ci-dessous). Depuis, ce taux d'engagement s'est stabilisé, et tend à remonter très lentement (+1 point tous les 3 ans). Durant la période 2010 à 2023, le taux de salariés français qui se déclarent activement désengagés a baissé régulièrement pour passer de 27,3 à 18,2 %. Et donc, pendant la même période, le taux de salariés désengagés, qui font plutôt du présentéisme au travail, a progressé dans la même proportion, passant de 62,6 à 74,8 %.

Lien entre santé mentale et productivité

Cette année, le rapport comporte un focus sur la santé mentale pour interpréter certaines données. Il met en évidence une augmentation générale du stress des salariés et préconise la mise en œuvre par les entreprises de stratégies pour le combattre. Une corrélation directe est démontrée entre le bien-être des salariés et celui de l'entreprise, et l'engagement des salariés en est un indicateur clé.

Un engagement élevé est corrélé à une augmentation de la productivité et de la rentabilité, ainsi qu'à une diminution du turn-over. Ainsi, avec des employés engagés, les entreprises voient leur productivité augmenter de 23 %. En parallèle, le bien-être des salariés augmente de 68 %, et le taux de turn-over du personnel baisse de 51 %.

Selon Gallup, le bien-être mental des salariés s'est dégradé depuis 10 ans. Aujourd'hui, le nombre de personnes exprimant du stress, de la tristesse, de l'anxiété, de la colère ou de l'inquiétude a augmenté pour atteindre son niveau le plus élevé jamais observé depuis le début de ce programme.

Comment agir sur l'engagement de ses salariés ?

Dans une entreprise comme l'est une clinique vétérinaire, mesurer l'engagement de ses salariés peut passer par un certain nombre de propositions à leur faire pour évaluer leur ressenti, par exemple sur une échelle de 0 (pas du tout d'accord) à 5 (tout-à-fait d'accord). Il est nécessaire cependant que le niveau de confiance soit satisfaisant pour s'assurer que chacun puisse s'exprime librement. Dans le cas inverse, il sera préférable de le faire de manière anonyme ou de confier ce travail à un prestataire extérieur. L'objectif est de construire un baromètre annuel basé sur des indicateurs chiffrés.

Ces propositions peuvent être (sans se limiter à) :

• Je suis satisfait de mon environnement professionnel et de mon lieu de travail ;
• Je sais ce qu'on attend de moi au travail ;
• J'ai le matériel et l'équipement dont j'ai besoin pour faire mon travail correctement ;
• Chaque jour, j'ai les moyens de mieux faire mon travail ;
• Au cours des 7 derniers jours, j'ai reçu de la reconnaissance ou des éloges pour avoir fait du bon travail ;
• Mon manager, ou quelqu'un au travail, semble se soucier de moi en tant que personne ;
• Il y a quelqu'un au travail qui encourage mon développement ;
• Au travail, mes opinions semblent compter ;
• La mission ou le but de mon entreprise me fait sentir que mon travail est important ;
• Mes collègues autour de moi s'engagent à réaliser un travail de qualité ;
• Au cours des 6 derniers mois, quelqu'un au travail m'a parlé de mes progrès ;
• Cette dernière année, j'ai eu l'occasion d'apprendre et de grandir au travail ;
• Mon entreprise se soucie de mon bien-être ;
• J'ai reçu des commentaires constructifs la semaine dernière ;
• Ma clinique tient toujours les promesses faites à ses clients.

Enfin, le rapport conclut sur l'importance des managers dans l'engagement des salariés. Les managers engagés conduisent en effet à un meilleur engagement de leurs équipes. Ils sont à l'origine de 70 % de la variance de l'engagement des collaborateurs. D'où l'importance pour les entreprises de soutenir les fonctions managériales. Cela passe par la maîtrise du feedback, la juste distribution des signes de reconnaissance et le développement des compétences.