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20 décembre 2024
Addison félin : rare et plutôt de bon pronostic, à court et long terme
La maladie d'Addison (hypoadrénocorticisme) est bien connue chez le chien (et chez l'homme), beaucoup moins dans l'espèce féline chez laquelle elle est rare. Sur une période de 21 ans (2000-2021), 41 cas ont toutefois été recensés, dans le cadre d'une étude rétrospective la ciblant spécifiquement.
Cette large étude multicentrique internationale a impliqué 24 établissements vétérinaires, répartis dans 14 pays, en Europe surtout, dont l'ENV Alfort en France, mais aussi en Amérique du Nord, en Asie, en Océanie… Les résultats sont publiés en libre accès dans le JVIM.
L'un des biais de cette étude découle de cette diversité d'établissements, donc de pratiques (diagnostiques et thérapeutiques), mais elle étoffe les connaissances sur cette maladie dans l'espèce féline, reposant jusque-là sur des rapports de cas isolés ou de petites séries de cas.
Les cas retenus ici pouvaient avoir été diagnostiqués en clinique « généraliste » ou en consultation spécialisée, mais en pratique, ils l'ont quasiment tous été en structure de référés. Pour être inclus, une cortisolémie sous le seuil de 3 µg/dl (83 nmol/l) avait été mesurée après l'injection d'ACTH (test de stimulation à l'ACTH), permettant d'établir le diagnostic. Une corticothérapie (même locale), un traitement avec un antifongique azolé ou de la progestérone dans les 4 semaines précédant le test étaient des critères d'exclusion, de même que l'administration d'un corticoïde longue action dans les 3 mois précédents (sauf cas d'augmentation de l'ACTH endogène si mesurée). Les cas d'adrénalectomie, d'hypophysectomie ou d'hyperadrénocorticisme (Cushing) ont également été écartés.
La plupart de ces cas ont été diagnostiqués entre 2011 et 2021 (n=37), période durant laquelle la maladie était probablement davantage recherchée, chez le chat aussi.
L'âge médian de ces chats est de 5,7 ans au moment du diagnostic, et leur poids médian de 3,8 kg. Ils pouvaient être maigres ou obèses, mais plutôt globalement en sous-poids (note d'état corporel de 4/9 en médiane). Les mâles sont légèrement majoritaires (56 %).
Une prédisposition du British shorthair était suspectée ; la cohorte en compte 4 ici (soit environ 10 % ; 25 autres cas étaient des croisés).
Des signes cliniques étaient présents depuis 23 jours en médiane au moment du diagnostic. Les plus fréquents (touchant plus de la moitié des cas) sont les suivants :
Une hyponatrémie et une hyperkaliémie étaient des anomalies déjà documentées dans les cas d'Addison félins. Elles sont effectivement très fréquentes ici, sans toutefois être systématiques : sur les 41 chats de l'étude, 36 (soit 88 %) présentaient une hyponatrémie, une hyperkaliémie, ou les deux (17 cas). Les 5 autres (soit tout de même 12 % des cas) avaient des résultats normaux pour ces 2 paramètres. L'absence de ces anomalies électrolytiques ne doit donc pas faire écarter l'hypothèse d'un hypoadrénocorticisme, comme dans l'espèce canine.
Les 2 groupes de chats ont été comparés dans la suite de l'analyse. Aucune différence significative n'a été observée concernant les données démographiques des animaux (âge, poids, sexe).
En termes de signes cliniques, les chats normonatrémiques et normokaliémiques présentent significativement plus souvent des vomissements : 100 % des cas ici contre 31 % dans l'autre groupe.
Lors d'hyponatrémie et/ou d'hyperkaliémie, une hypothermie, une déshydratation, une faiblesse, sont significativement plus souvent mises en évidence à l'examen clinique (71 à 74 % des cas, contre 20 % dans l'autre groupe). Une tachypnée est également fréquente, dans les 2 groupes (25 à 30 % des cas).
Le bilan sanguin met aussi très souvent en évidence (sans différence entre les groupes) :
Selon les auteurs, une hypercalcémie serait donc un paramètre renforçant l'hypothèse d'hypoadrénocorticisme chez un chat.
Les auteurs relèvent aussi des anomalies (lorsque recherchées) concernant :
Une entéropathie chronique était également suspectée chez le 5e chat atteint d'hypocobalaminémie. Selon les auteurs, les liens entre hypocobalaminémie, IPE et maladie d'Addison mériteraient d'être explorés ; la maladie d'Addison vraie (hypoadrénocorticisme primaire) découle probablement en effet de troubles autoimmuns, qui pourraient affecter aussi le pancréas et ainsi entraîner une déficience en cobalamine (vitamine B12). Celle-ci peut aussi découler de l'entéropathie chronique.
Un probable hypoadrénocorticisme primaire est associé à 13 cas chez lesquels un dosage de l'ACTH endogène a été réalisé (montrant des valeurs très augmentées).
Dans 2 cas, un lymphome touchant les surrénales a été diagnostiqué à l'autopsie, potentiellement à l'origine d'un d'hypoadrénocorticisme secondaire. Des masses suspectes avaient été observées à l'échographie abdominale chez ces chats, ce qui renforce l'intérêt de cet examen lors de suspicion d'hypoadrénocorticisme félin.
Les protocoles de traitement étaient variables, associant gluco- et minéralocorticothérapie, fluidothérapie, et transfusion de sang dans un cas, selon divers protocoles. Les traitements corticoïdes (prednisolone, fludrocortisone, désoxycorticostérone pivalate (DOCP)) ont été poursuivis au long cours à domicile, à nouveau suivant des protocoles variables afin d'aboutir au contrôle de la maladie, qui apparaît plus complexe que dans l'espèce canine. Les auteurs relèvent que les doses de DOCP initialement requises sont généralement plus élevées que chez le chien (2,2 mg/kg), ce qui est déjà recommandé par ailleurs.
Le pronostic de la maladie d'Addison était méconnu chez le chat, avec peu de cas où un suivi à long terme était renseigné. Cette nouvelle étude permet donc de l'affiner. Et les résultats montrent qu'il n'est pas mauvais.
Ainsi, le taux de survie à court terme est relativement élevé, avec 35 chats ayant survécu à l'hospitalisation, soit 85 % (ce qui est toutefois plus faible que chez le chien). La durée de l'hospitalisation était de 4 jours en médiane. Chez 2 chats ayant survécu à la prise charge d'urgence, le contrôle de la maladie n'a toutefois pas été satisfaisant, et ils ont été euthanasiés, 10 et 40 jours après le diagnostic.
Les 6 chats n'ayant pas survécu à l'hospitalisation ont généralement été euthanasiés (5/6), par manque de réponse au traitement (4 cas) ou suite au diagnostic de lymphome (1 cas), qui semble altérer le pronostic ; le dernier est mort d'un arrêt cardiorespiratoire.
Le suivi à long terme (renseigné pour 32 chats) montre qu'à l'issue de la période d'étude, 12 chats, soit 29 % de l'ensemble de la cohorte, étaient encore en vie. Parmi les 14 décédés, 5 l'ont été en lien avec l'hypoadrénocorticisme.
Le délai de survie médian (toute cause confondue) est de 2035 jours, soit environ 5 ans et demi (voir figure en illustration principale), ce qui montre que la maladie d'Addison est plutôt de pronostic favorable chez le chat. Ce délai de survie ne varie pas entre les 2 groupes de chats précédemment identifiés, ni selon le protocole de traitement.
Durant ce suivi, un chat a développé un diabète sucré (135 jours après le diagnostic d'Addison) et un autre une hyperthyroïdie (2373 jours après), ce qui montre une bonne tolérance des traitements sur le système endocrinien.
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