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Elanco & Proplan

9 juin 2020

Urgence : la décompression chirurgicale d'une hernie discale thoraco-lombaire aiguë ne doit pas être remise au lendemain

par Agnès Faessel

Temps de lecture  3 min

Répartition et évolution des 273 cas de hernie discale thoraco-lombaire de stade 3 ou 4 (perte de mobilité mais conservation de la nociception profonde) dont le traitement chirurgical a été pratiqué le jour même ou différé de 24 à 48h. D'après Martin et al., JSAP 2020.
Répartition et évolution des 273 cas de hernie discale thoraco-lombaire de stade 3 ou 4 (perte de mobilité mais conservation de la nociception profonde) dont le traitement chirurgical a été pratiqué le jour même ou différé de 24 à 48h. D'après Martin et al., JSAP 2020.
 

Lors de hernie discale thoraco-lombaire aiguë chez le chien, la perception de la douleur au niveau des membres postérieurs (nociception profonde) est considérée comme un indicateur fiable du pronostic de récupération post-chirurgicale. Si elle est conservée, la probabilité que l'animal retrouve sa mobilité perdue est élevée (environ 9 chances sur 10 contre 1 chance sur 2 dans le cas contraire). C'est donc en se basant sur ce critère qu'une étude a été menée pour évaluer l'impact du délai d'intervention sur le risque de séquelles. Et ses résultats montrent qu'il est préférable d'opérer le jour même, sans laisser passer une nuit !

Des atteintes de stade 3 ou 4

L'étude a porté rétrospectivement sur 273 cas diagnostiqués et pris en charge à la clinique de référés de l'école vétérinaire de Bristol en Angleterre (sur une période de 4 ans : 2015-2018). Les chiens inclus étaient sévèrement atteints, avec une perte de la mobilité (capacité à se déplacer en autonomie) mais une nociception conservée. Ces cas correspondent aux stades 3 (paraparésie) et 4 (paraplégie) de la classification de Frankel. Au stade 5, la nociception profonde est perdue (au niveau des membres postérieurs et de la queue). Aux stades inférieurs, l'animal présente une hyperesthésie de la colonne vertébrale (stade 1) ou une ataxie ambulatoire (stade 2) mais parvient encore à se déplacer seul.

La localisation de la hernie était variable. Le délai entre l'apparition des symptômes (perte de mobilité) et la présentation à la clinique variait aussi, mais il était globalement court (24 heures en médiane).

Tous les chiens ont été traités chirurgicalement (décompression médullaire), dans les 48h ayant suivi le premier examen neurologique en consultation. Mais ils ont été séparés en deux groupes (voir figure en illustration principale).

  • Groupe 1 : opérés le jour de la consultation (J0, n=151) ;
  • Groupe 2 : opérés le lendemain voire le surlendemain (J1 ou J2, n=122).

En pratique, les chiens amenés le matin ou en début d'après-midi étaient opérés dans la journée. Les autres étaient hospitalisés et l'intervention retardée au jour suivant.

Dégradation durant la nuit

Les auteurs de l'étude ont alors analysé l'évolution des cas durant la première nuit. Et ils observent le matin à J1 qu'une dégradation, c'est-à-dire la disparition de la nociception profonde (évolution au stade 5), est moins fréquente chez les chiens opérés dès J0 (7 cas soit 5 %) que chez les autres (15 cas, 12 %). La différence est significative.

Inversement, les cas d'amélioration en 24h (J1) sont plus fréquents chez les chiens opérés : 42 versus 11 (dont 3 chez qui l'opération n'a finalement pas été nécessaire), voir figure précédente et tableau ci-dessous.

 

Entre J1 et J2, l'un des chiens du groupe 2 a présenté une détérioration post-chirurgicale (aucun dans le groupe 1).

Évolution plus favorable à terme

Le devenir des animaux 3 mois après l'intervention a également été analysée lorsque possible (d'après le dossier médical du chien ou un questionnaire transmis au propriétaire). Ce suivi montre une évolution plus favorable des chiens opérés le jour même de la consultation. Dans ce groupe, parmi ceux qui avaient perdu leur nociception profonde le lendemain matin (J1), la grande majorité (5/7 soit 71 %) l'a retrouvée après 3 mois. Dans l'autre groupe, cette récupération est moins fréquente (8/14 soit 57 %, voir figure).

Parmi les individus qui avaient conservé leur sensibilité à la douleur à J1, une proportion équivalente dans les deux groupes a retrouvé sa mobilité après 3 mois (96 et 97 %).

Selon ces observations, face à un cas de hernie discale thoraco-lombaire avec perte de mobilité, il apparaît ainsi bénéfique de pratiquer la décompression médullaire chirurgicale dans la journée, plutôt que de laisser passer une nuit, pour éviter l'aggravation des lésions et le risque de séquelles.