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Elanco & Proplan

4 février 2025

Dogue de Bordeaux, boxer, flattie et braque allemand sont les races les plus prédisposées aux insulinomes

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Le dogue de Bordeaux fait partie des 6 races canines « ultra-prédisposées » à l'insulinome, selon une étude épidémiologique britannique (cliché Tomer Jacobson, wikimedia).
Le dogue de Bordeaux fait partie des 6 races canines « ultra-prédisposées » à l'insulinome, selon une étude épidémiologique britannique (cliché Tomer Jacobson, wikimedia).
 

Il y a environ 40 cas d'insulinome par million de chiens et par an. C'est l'un des résultats mis en avant par une étude épidémiologique britannique publiée en janvier. Elle a suivi la méthodologie à présent bien rôdée de l'étude VetCompass, qui utilise les dossiers électroniques des animaux de compagnie ayant fréquenté au moins une fois l'une des plus de 900 structures généralistes ayant accepté de partager ces éléments anonymisés (30 % des structure britanniques), sur l'année 2019. Elle montre aussi que sept races de chiens présentent une prédisposition hautement significative pour cette néoplasie.

Rare, mais moins qu'en humaine

Les auteurs ont ainsi disposé de 2 250 241 dossiers médicaux de chiens ayant consulté en 2019, dont 278 ont développé un insulinome confirmé. Ce qui correspond à une prévalence annuelle moyenne de 0,004 % (soit 40 par million). Les auteurs remarquent qu'en médecine humaine, l'incidence annuelle figurant dans la littérature scientifique va de 0 à 4 cas par million d'habitants et par an… Et comme les signes cliniques des chiens affectés sont peu spécifiques et les analyses complémentaires moins développées qu'en humaine, il est probable que le différentiel entre les deux espèces soit supérieur à un facteur 10. Autre différence : à peine 5 à 16 % des insulinomes humains sont malins, contre la quasi-totalité de ceux des chiens. Ce qui fait souligner aux auteurs que ces patients canins représentent « un modèle d'étude translationnelle de cette néoplasie chez l'humain ».

Femelles stérilisées plus à risque

Pour la présente étude, qui est aussi celle portant sur le plus grand nombre de cas d'insulinomes canins jamais publiée, les auteurs calculent que par rapport à une durée de vie moyenne canine, la néoplasie a une prévalence de 0,012 % (1,2 “chances” sur 10 000). Plus de la moitié des cas sont survenus sur des femelles (55 %, dont les trois quarts étaient stérilisées). En analyse multivariée – qui prend en compte les biais d'association potentiels entre variables – seul le fait d'être une femelle stérilisée apparaît comme facteur de sur-risque d'insulinome (x 1,5, p=0,019). C'est la première étude à identifier ce facteur de risque. Cela pourrait être lié au rôle de œstrogènes, dont la cyclicité serait protective, mais cela pourrait aussi être lié à l'âge (voir ci-dessous ; la proportion de femelles stérilisées augmente avec l'âge). Il n'y a pas de sur-risque lié au sexe mâle.

Âge et surpoids

De la même façon, les auteurs observent un effet âge significatif par rapport à la classe d'âge des 6 - <9 ans prise en référence :

  • ainsi, si le chien est plus jeune (0 à <6 ans), l'effet est protecteur (90 % de risques en moins par rapport à l'incidence à 3  -<6 ans) ;
  • plus il est âgé et plus le sur-risque est important (x 2,5 jusqu'à 15 ans), avec un arrêt de l'effet mesurable après 15 ans, du fait du faible nombre de chiens parmi cette classe d'âge.

Sans grande surprise, le surpoids présente aussi un effet significatif : les chiens au-dessus du poids médian de leur sexe et de leur race présentent un sur-risque x 1,4 d'insulinome (p=0,006). Toutefois, cet aspect pourrait être plus une conséquence qu'une cause de l'insulinome (« les chiens atteints ont tendance à prendre du poids après l'apparition de la maladie en raison des effets anabolisants de l'insuline sur le métabolisme »).

Six races « ultra-prédisosées »

Lorsqu'ils s'intéressent aux races, les auteurs ne retiennent que celles pour lesquelles deux cas d'insulinome ont été confirmés dans la population étudiée. Et dans l'analyse multivariée, il y a sept races qui présentent une prédisposition :

  • six sont dites « ultra-prédisposées » : le dogue de Bordeaux, avec un sur-risque x 9,3 par rapport à un chien croisé ; le braque allemand (x 8,7), le flat-coated retriever (x 8,2), le boxer (x 8,2), le Viszla (x 6,3) et le West Highland White terrier (x 4,2) ; tous avec p<0,001. Parmi ces races, cette étude représente la première identification d'une telle prédisposition pour le dogue de Bordeaux, le braque allemand et le flattie.
  • L'épagneul anglais présente lui aussi un sur-risque significatif, mais plus limité (x 2,1).
  • Enfin, lorsqu'ils analysent les groupes de races, les auteurs relèvent (toujours en analyse multivariée) que le fait d'être un terrier présente lui aussi un sur-risque (x 1,4, p=0,022). Ils observent aussi que les races prédisposées aux cancers de la thyroïde et de la parathyroïde ont aussi un sur-risque d'insulinome (x 2,9 et x 1,9, respectivement, p<0,001 dans les deux cas).

Les auteurs identifient aussi les Labrador retrievers comme la seule race significativement protégée de cette néoplasie (70 % de protection par rapport au risque d'un croisé). Au final, ils estiment que « de futures études génomiques sur les variantes génétiques qui contribuent au développement de l'insulinome canin pourraient bénéficier d'une comparaison entre les races prédisposées et celles protégées ».