23 décembre 2024
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« La confiance n'exclut pas le contrôle » ! Qui n'a jamais entendu cela de la part de son supérieur hiérarchique ou lors d'une formation en management ? Une de ces phrases simples, voire simplistes, donc fausse, autorisant à venir s'immiscer dans le travail en cours d'un collaborateur ou poussant à surveiller ses résultats. Alors que le contrôle est justement antinomique de la confiance.
La confiance a pour étymologie latine cum fidere, c'est à dire avec foi. La confiance est une croyance, un pari ; elle inclut donc l'incertitude, l'absence de contrôle absolu justement. Car la confiance n'est pas l'infaillibilité. Avoir confiance ne signifie pas être certain. La confiance intègre la possibilité de l'erreur, de la déception. Elle témoigne ainsi de la capacité à se rendre vulnérable, y compris avec une personne que nous pensons pourtant fiable.
Ce besoin de contrôle est une expression inconsciente de notre volonté de chasser nos peurs : la peur que le résultat ne soit pas à la hauteur de ce que nous attendons, la peur que le dossier ne soit pas complet, que le client ne soit pas content, que la situation nous échappe…
Plus nous avons peur, plus nous cherchons à contrôler les événements. Notre monde n'a jamais été aussi changeant et incertain. Cette incertitude, dont notre cerveau a horreur, génère davantage de peurs et donc davantage de volonté de contrôler pour se rassurer. Alors que nous ne pouvons contrôler que ce qui dépend de nous. Car, comme le souligne Epictète, « il y a ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous ».
Nous ne pouvons pas contrôler ce que font, disent ou pensent les autres, ou certaines situations pour lesquelles nous n'avons aucune influence. Alors que la volonté de contrôle s'applique, hélas, dans toutes les dimensions. C'est particulièrement criant pour les perfectionnistes, profil rencontré régulièrement dans notre monde vétérinaire. Plus le perfectionniste recherche la perfection, plus il se focalise sur les inévitables imperfections des situations qui nous entourent. Et cette quête de l'absolu, aujourd'hui plus que jamais, conduit irrémédiablement à la frustration, voire à l'épuisement personnel ou professionnel. Comme un horizon qu'ils ou elles souhaiteraient atteindre mais qui reculerait au fur et à mesure qu'ils ou elles avancent.
Nous devons accepter que nous ne puissions pas tout contrôler, et qu'il restera toujours des zones de doute, des zones grises, des zones de peurs. Le burn-out est, hélas, le fruit d'un objectif inatteignable (sauver tous les animaux, satisfaire tous les clients, ne jamais faire d'erreur…), donc en clair de vouloir tout contrôler et de s'acharner à atteindre cet objectif inatteignable. Le contrôle est la main mise que nous espérons avoir sur nous, sur les autres, et sur l'environnement. Plus nous souhaitons tout contrôler, plus nous sommes rigides, plus nous sommes crispés, plus nous cherchons à exercer une autorité. Se braquer face au danger ne règle pas ce danger.
Faire le distinguo entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous est une première étape pour lutter contre ce besoin de contrôle. Il passe, par exemple, par un certain « lâcher prise » sur ce qui ne dépend pas de nous. « Attends-toi à l'inattendu », comme le souligne le centenaire Edgar Morin. Ainsi, plus nous acceptons que nous ne puissions pas tout contrôler, moins nous sommes surpris et embarrassés par les situations inattendues. Plus nous intégrons que potentiellement elles peuvent survenir, moins elles deviennent stressantes. Plus nous avons préparé notre cerveau à toutes les éventualités, moins nous avons peur quand elles arrivent.
Ensuite, il nous faut accepter que nous ne puissions pas être individuellement infaillible, même si nous faisons toujours de notre mieux, même si nous nous devons d'être engagés dans notre travail, au vu des enjeux pour les animaux et leurs propriétaires. Car il est impossible, dangereux et inacceptable d'imaginer pouvoir être dans un total lâcher prise, déconnecté du monde dans lequel nous vivons. Le lâcher prise se doit de se centrer sur certaines de nos croyances, à l'origine de nos émotions désagréables comme la peur, par exemple : « nous n'avons pas le droit à l'erreur » « nous devons réussir tout ce que nous faisons », « nous devons sauver tous les animaux ». Cette acceptation permet de calmer ses peurs, de travailler sa confiance en soi. Car la confiance est l'antidote de la peur. Alors qu'au contraire, plus nous cherchons à contrôler, plus nous prenons conscience de nos peurs, plus nous les faisons grandir en nous et, au final, moins nous développons la confiance, ni en l'autre ni en soi. Plus nous souhaitons contrôler, moins nous sommes libres et confiants.
Ainsi, fuyez le contrôle, abandonnez le lâcher prise permanent, et visez la maîtrise. Le premier rime avec autoritarisme ou déception, le second avec le « je-m'en-foutisme » ou l'inconscience. La 3e voie conduit à la maîtrise, un sentiment de puissance vis-à-vis de soi, des autres et des situations. Être maître de ses nerfs, de soi, de ses émotions (ce qui ne signifie pas les refouler ou les masquer !), de la situation.
Maîtriser, c'est avoir la capacité de s'ajuster personnellement ou en équipe pour répondre aux événements. Cela nécessite des compétences et de l'expérience. Le grand chef en cuisine maîtrise ses recettes, même s'il ne peut pas les contrôler. La maturité des tomates est différente d'une fois sur l'autre, les ingrédients naturels ne sont pas standardisés. En revanche, il est capable de s'adapter pour obtenir le meilleur résultat. De même, l'artiste peintre maîtrise ses pinceaux et sa technique, le chanteur d'opéra maîtrise sa voix, le musicien maîtrise son instrument, le chirurgien (vétérinaire) maîtrise son geste. Et cela demande aussi d'apprendre de ses erreurs, d'avoir la curiosité de comprendre ce qui les a générées. Un autre sujet…
Le surfeur ne peut pas contrôler la mer ni la vague. La vague est comme elle est, hors de son propre contrôle. Donc vouloir la contrôler est non seulement totalement impossible mais cela enlèverait même tout le plaisir de parvenir à la surfer. Le pouvoir du surfeur est d'abord dans la maîtrise de son corps, de sa position sur la planche pour pouvoir rester en équilibre. Il est aussi dans la maîtrise de la planche, dans la maîtrise du geste technique pour parfaitement glisser sur la vague. Cela nécessite une confiance certaine et une acceptation de tomber parfois… le plus rarement possible, bien sûr. Ainsi le pouvoir du surfeur et son plaisir viennent de cette capacité d'adaptation, de cette incertitude maîtrisée, de sa capacité à progresser. Alors que le contrôle est une utopie, une illusion, une négation du réel, la maîtrise permet au contraire d'être pleinement dans la réalité, et de pouvoir surfer sur les difficultés.
Ainsi, la compétence n'est pas le contrôle mais la base de la maîtrise. Le contrôle pousse à espérer avoir du pouvoir « sur » : sur les situations, sur les gens, sur les choses. La maîtrise, elle, conduit à avoir du pouvoir « pour » : pour aider les autres, pour parvenir au meilleur résultat possible, pour sauver le maximum d'animaux.
Le contrôle et l'autorité sont toujours purement individuelles, alors que la maîtrise est soit individuelle, soit collective. Ainsi, la confiance exclut définitivement le contrôle. La confiance se nourrit de la maîtrise collective, et surtout de l'Attention à l'autre que cette dernière engendre.
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