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23 décembre 2024
La faune sauvage, emblème monétaire : cela va jusqu'à promouvoir la conservation des espèces menacées
Comment transformer sa passion en article scientifique ? C'est ce qu'ont fait trois chercheurs australiens courant 2024, en publiant une analyse du compendium mondial des billets de banque pour collectionneurs, à la recherche de représentations de la faune sauvage dans monde entier.
Pour leur analyse, les auteurs ont examiné 4 541 billets de banques de 207 pays, émis entre 1980 et 2017, présents dans la 25e édition du Standard Catalogue of World Paper Money. Leur objectif était avant tout de cartographier ces représentation animales et d'évaluer s'il s'agissait plutôt de faune autochtone ou non et d'espèces menacées ou pas. Les auteurs notent que les images d'animaux sauvages, en particulier d'espèces emblématiques (lions, éléphants…) servent souvent à promouvoir le tourisme animalier, ou à illustrer des campagnes de levées de fonds pour la conservation de la faune. « En revanche, les images figurant sur la monnaie (billets de banque et pièces) résultent d'un choix qui reflète les valeurs des citoyens d'un pays, notamment leurs dirigeants politiques, leur religion ou leurs réalisations dans le domaine des arts et des sciences (…) promouvant la conscience publique ou les valeurs nationales ». Mais la représentation des animaux sur la monnaie n'a pas été étudiée jusque-là. Pour limiter le champ de leurs investigations, les auteurs se sont arrêtés à l'examen des billets figurant des espèces endémiques du pays concerné. Les dates choisies « correspondent à l'émergence croissante d'accords et de conventions internationaux sur l'environnement, tels que la Convention sur la diversité biologique (1992), qui ont pu influencer la représentation de la faune et de la flore dans l'iconographie monétaire ».
L'examen leur fournit 883 illustrations de faune endémique, sur 689 billets de 92 pays. Toutefois la qualité de l'illustration n'a permis d'identifier le genre et l'espèce que dans 95,1 % des cas : leur analyse porte donc sur 352 espèces animales : 195 d'oiseaux, 96 de mammifères, 25 de poissons, 15 de reptiles, 9 d'invertébrés terrestres, 6 d'invertébrés aquatiques et autant d'amphibiens. Les espèces terrestres sont majoritaires (89,7 % des représentations). Les auteurs observent que les représentations de faune sauvage ont doublé après 1992, année de la signature de la convention sur la diversité biologique.
Les pays dont les billets sont le plus souvent ornés d'animaux sont les Seychelles, devant le Bélize, la Zambie, les Émirats arabes unis, les 7 pays des Caraïbes orientales leur disputant cette place lorsqu'ils sont pris ensemble. Le pays qui présente le plus d'espèces d'oiseaux est la Colombie, mais c'est parce qu'un « billet commémoratif rassemble à lui seul les 16 espèces endémiques ». Pour les mammifères, les pays les présentant le plus souvent sont la Zambie (12 espèces) et le Népal (11 espèces). Les territoires français du Pacifique arrivent au 9e rang pour les espèces animales, la France métropolitaine et l'EU étant absentes des 30 premières places. D'une manière générale, les pays d'Amérique du sud illustrent plus fréquemment leurs billets de banque par des oiseaux, tandis que ceux d'Afrique centrale les mammifères (voir ci-dessous).
Les mammifères, amphibiens, reptiles et invertébrés terrestres menacés sont plus fréquents sur les billets (de 33 % à 67 %) que les poissons et les oiseaux menacés (de 23 % à 28 %). Pour les reptiles, c'est en lien avec la mise en avant des tortues marines (verte et imbriquée). Pour les mammifères, c'est en lien avec l'aspect emblématiques des espèces de la savane africaine : la panthère est présente sur 49 billets de 5 des pays où elle est présente, l'éléphant d'Afrique sur 29 billets (11 pays) et le buffle africain sur 20 billets (11 pays). Pour les oiseaux, les grands gagnants ont le pygargue vocifer en Afrique (33 billets pour 2 pays) et le quetzal resplendissant (28 billet pour un seul pays). « Si les oiseaux (n = 50) et les mammifères (n = 10) endémiques sont plus nombreux sur les billets, les amphibiens et les invertébrés terrestres affichent les taux d'endémisme les plus élevés, avec respectivement 83 % et 56 %, malgré leur faible représentation dans l'ensemble ». Selon l'UICN, 28 % des espèces évaluées pour leur statut de conservation sont menacées d'extinction ou éteintes, dont 27 % des mammifères et 13 % des oiseaux. Dans le décompte des auteurs, 45 % des mammifères et 23 % des oiseaux représentés sont des espèces menacées. De fait, alors que 5 des 10 espèces de mammifères les plus représentées sont menacées d'extinction ou vulnérables, seules 2 des 6 espèces d'oiseaux le sont.
La préférence apparente pour la représentation d'espèces terrestres sur les billets de banque (89 % des espèces identifiées) pourrait être « due à la familiarité et à la plus grande probabilité d'observer des espèces terrestres, la visibilité de la faune ayant été suggérée comme un facteur d'utilisation de l'imagerie dans les promotions en ligne du tourisme de la faune ». Pour les espèces menacées, le choix peut être délibéré : les Fiji ont lancé en 2012 une série de billets de banque destinée à illustrer la biodiversité du pays, et le Brésil a mis le tamarin-lion doré sur ses billets de 20 réals en 2002, dans les deux cas sous la pression des agences locales de conservation. Il reste que, si l'endémisme d'une espèce n'est pas source de sa sur-représentation sur les billets, son statut menacé lui assure une visibilité accrue. Reste à savoir si ces représentations ont un effet dans l'imaginaire collectif des pays respectifs. C'est difficile à affirmer, précisent les auteurs car cela a été démontré pour des personnages ou des institutions, mais la représentation de la faune est récente. Ils citent toutefois aussi le cas de la Réserve fédérale d'Afrique du Sud, qui a lié « explicitement la représentation des “big five” à [ses] valeurs fondamentales que sont la “responsabilité”, le “respect et la confiance”, l'“excellence”, la “communication ouverte” et l'“intégrité”. En reliant ces valeurs, la [banque] indique que le rhinocéros est un symbole important de la protection d'un avenir commun »…
Petit cadeau de Noël : il existe au moins deux vétérinaires figurant sur un billet de banque. Par ordre d'ancienneté, le premier est John Boyd Dunlop, né en 1840 et diplômé de la faculté vétérinaire d'Édimbourg l'inventeur du pneumatique pour vélos (sa biographie indique qu'il les a inventés pour le tricycle de son fils), puis pour voitures. Il est à l'origine de l'empire industriel qui porte son nom, et l'histoire se souvient rarement que cet Écossais était aussi vétérinaire. Son effigie a figuré sur les billets de 10 livres Sterling émis par la Northern Bank entre 1988 et 1996, et aussi de la banque d'Irlande du Nord en 1999. De fait, il avait quitté son Écosse natale assez jeune et s'était établi comme vétérinaire praticien à Downpatrick en 1867, alors en Irlande, à présent en Irlande du Nord, avec son frère, également vétérinaire. Au milieu des années 1880, il a établi une clinique à Belfast, qui en quelques années est devenue l'une des plus importantes cliniques d'Irlande ; il a pris sa retraite de vétérinaire en 1892, et d'est alors installé à Dublin. Le second est un parasitologiste vétérinaire australien : Sir Ian Clunies Ross. Né en 1899 en Nouvelles Galles du Sud, il sort second de sa promo en 1920, à l'université de Sydney. Assistant d'anatomie l'année suivante, il se rend au Royaume-Uni peu après, étudiant la parasitologie à l'université de Cambridge, à la London School of Tropical Medicine and Hygiene puis aux États-Unis (Texas et Louisiane), avant de revenir s'installer comme praticien à Sydney. En parallèle, il continuait à donner des cours à l'université vétérinaire. Ses recherches ont porté sur l'échinococcose (Echinococcus granulosus), la grande douve (Fasciola hepatica) et la principale tique du chien en Australie (Ixodes holocyclus). Selon sa fiche wikipedia, il aurait développé « un protocole d'immunisation des chiens contre cette tique ». Scientifique hyperactif, il est nommé en 1926 à la tête du service de parasitologie de l'organisme fédéral de recherche australien tout juste créé, le Council for Scientific and Industrial Research (CSIR), dont il prend la tête en 1931. Il est ensuite nommé en Asie, aux USA, fait partie de la délégation australienne à la Société des Nations en 1938, devient directeur du personnel du CSIRO (le CSIR était entretemps devenu la Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation) en Australie en 1943, puis prend la tête des recherches sur les ovins et la laine… Il est anobli par la reine d'Angleterre en 1949… L'émission du billet de 50 dollars australiens à son effigie en 1973 a donné lieu à un article dans l'Australian Veterinary Journal; le billet est resté en circulation jusqu'en 1995. De nombreux articles d'hommage à son travail scientifique lui sont consacrés dans ce même journal, et son épouse a écrit une biographie le concernant… après son décès survenu en 1959.
Avec ce dernier Fil de 2024, toute l'équipe du Fil.vet vous souhaite de joyeuses fêtes et une excellente année 2025, vous donnant rendez-vous le 2 janvier prochain.
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