titre_lefil
Elanco & Proplan

15 octobre 2024

Dr Google en médecine vétérinaire, ami ou ennemi ? Les avis des propriétaires et des vétérinaires divergent…

par Pascale Pibot

Temps de lecture  5 min

Selon une enquête réalisée dans 3 pays d'Europe, plus de la moitié des propriétaires de chiens et de chats s'informent sur Internet à propos de la santé de leurs animaux (cliché Pixabay).
Selon une enquête réalisée dans 3 pays d'Europe, plus de la moitié des propriétaires de chiens et de chats s'informent sur Internet à propos de la santé de leurs animaux (cliché Pixabay).
 

Les propriétaires de chiens et de chats qui cherchent à en savoir plus sur la santé de leurs animaux ont régulièrement recours à Internet. Cette habitude est une source fréquente d'énervement des praticiens, qui ont tendance à croire que leurs clients veulent utiliser les informations recueillies en ligne pour les « challenger ». Cette attitude paraît cependant très minoritaire.

Qui sont les clients qui s'informent sur Internet ? Les jeunes surtout

Une enquête réalisée en 2022 auprès de 2117 propriétaires, 800 en Autriche, 626 au Danemark et 691 au Royaume-Uni, a effectivement tenté de préciser les objectifs des propriétaires quand ils consultent des informations vétérinaires en ligne.

Dans les trois pays, plus de la moitié des propriétaires utilisent Internet comme source d'information à propos de leurs animaux. Et sans surprise, ce sont les plus jeunes qui sont les plus habitués à faire ces recherches.

Le questionnaire a tenu compte de l'âge, du sexe, du niveau d'éducation, du mode de vie et de l'activité professionnelle des répondants, mais aussi de leur degré d'attachement à leur animal. Les auteurs avaient supposé qu'un degré élevé d'attachement augmenterait la probabilité que les propriétaires recherchent des informations vétérinaires sur Internet, et les résultats ont confirmé cette hypothèse.

Que consultent-ils ? Les sites web des cliniques !

Plus de la moitié (55 %) des propriétaires consultent des sites web traitant de la santé des animaux, 35 % vont d'ailleurs sur ceux des cliniques vétérinaires !

Ils ne sont que 18,5 % à chercher des informations vétérinaires sur les médias sociaux, et 11,7 % sur les blogs et les forums. Au Royaume-Uni, les propriétaires de chiens et de chats sont cependant nettement plus nombreux (26 %) à utiliser les médias sociaux pour trouver des informations médicales à propos de leurs animaux de compagnie ; seuls 16 % des propriétaires autrichiens et 12 % des propriétaires danois ont recours à cette source d'information.

Consultent-ils avant ou après la consultation ? Les deux

Plus de 60 % des propriétaires déclarent aller sur Internet avant de consulter leur vétérinaire. Ils y cherchent en particulier des informations pour les aider à décider s'ils doivent ou non prendre rendez-vous.

Dans les trois pays, les propriétaires estiment aussi qu'une recherche sur Internet peut faciliter la discussion ultérieure avec le vétérinaire. Les propriétaires qui affichent cet objectif comme prioritaire utilisent d'ailleurs plus souvent les ressources du net avant la consultation qu'après.

En revanche, les propriétaires qui vont sur Internet après la consultation justifient cette démarche par le fait que cela les aide à prendre les bonnes décisions pour leur animal. Grâce aux progrès récents de la médecine vétérinaire canine et féline, plusieurs options diagnostiques et thérapeutiques sont en effet souvent proposées aux propriétaires, et l'accès à des informations en ligne est susceptible de clarifier les choses.

Seuls 12 % des répondants ont déclaré qu'ils avaient déjà constaté une discordance entre l'avis du vétérinaire et les informations obtenues en ligne. Dans cette étude, les propriétaires danois étaient cependant nettement moins nombreux (4,9 %) que les propriétaires autrichiens (13,6 %) ou britanniques (16,1 %) à déclarer avoir trouvé un désaccord avec les conseils de leur vétérinaire. Cette différence est probablement due au fait que c'est au Danemark que le taux de consultation des sites des cliniques vétérinaires et le degré de confiance des propriétaires envers les vétérinaires sont les plus élevés.

« Dr Google », une source de conflit ?

Les auteurs de cette étude avaient déjà réalisé une enquête auprès des vétérinaires canins et félins dans ces trois mêmes pays au sujet de l'utilisation d'Internet par leurs clients. Les résultats des deux études ont donc pu être comparés, et des différences ont été constatées.

  • Plus de 70 % des vétérinaires interrogés considèrent ainsi que l'utilisation d'Internet par les propriétaires augmente le niveau d'exigence de ces derniers en matière de moyens diagnostiques et thérapeutiques, et les amène à douter de leurs recommandations. Ils se déclarent de plus en plus souvent confrontés à des situations où les clients remettent en question leurs conseils, en se basant sur des informations obtenues sur Internet, ce qui dégrade la relation entre le client et le praticien. Seulement 40 % des propriétaires de chiens et de chats sont cependant d'accord avec ces effets potentiels.
  • Par ailleurs, 66 % des propriétaires estiment que se documenter sur Internet améliore la communication avec le vétérinaire alors que les praticiens sont seulement 49 % à partager ce point de vue.

Plusieurs implications pratiques pour les vétérinaires

Même si les points de vue des clients et des vétérinaires diffèrent, les résultats de cette étude permettent de formuler quelques recommandations pratiques utiles.

  • Optimiser le site web de la clinique : plus d'un tiers des propriétaires de chiens et de chat consultent les sites web des cliniques vétérinaires pour obtenir des informations. Ces sites doivent donc être régulièrement optimisés et mis à jour afin de fournir des informations fiables et intéressantes. Le site ne doit pas se limiter à lister les services proposés par la clinique mais fournir également des informations vétérinaires de qualité, fondées sur des preuves, ou renvoyer à des sites fiables que leurs clients peuvent consulter. La mise à disposition d'informations appropriées aide à lutter contre la désinformation et la méfiance éventuelle concernant les soins à prodiguer aux animaux.
  • Susciter la discussion : plutôt que d'éviter le sujet, le vétérinaire peut avoir intérêt à demander franchement au propriétaire s'il a effectué des recherches en ligne avant de venir, et à se renseigner sur les sources consultées. Une discussion ouverte sur le sujet peut contribuer à instaurer un climat de confiance avec le client et avoir un effet positif sur les décisions qui devront être prises ultérieurement.
  • Ne pas considérer « Dr Google » comme une source de conflit : en allant sur Internet, la plupart des propriétaires cherchent à préparer la consultation vétérinaire ou à s'appuyer sur des données fiables pour prendre de bonnes décisions. Il est donc préférable de considérer cette tendance à se documenter en ligne de manière positive et constructive, plutôt que de vouloir décourager les clients de le faire.