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24 novembre 2015
L’antibiogramme deviendra obligatoire pour le recours à un antibiotique critique en 2016
Un examen clinique et un antibiogramme devraient devenir obligatoires au 1er janvier 2016 avant de prescrire une fluoroquinolone ou une céphalosporine de dernières générations (C3G/C4G). La validité de l’ordonnance sera limitée à un mois.
L’encadrement des antibiotiques critiques est prévu avec les mesures 25 et 26 du plan EcoAntibio 2012-2017. Dès 2011, il est évoqué un antibiogramme obligatoire. Voilà donc plusieurs années qu’un projet de décret « antibiotiques critiques » est discuté avec les organisations vétérinaires.
Un peu plus d’un an après la promulgation de la loi d’avenir, ce décret arrive au terme des procédures de consultation avant sa parution au Journal officiel, probablement d’ici à la fin de l’année. Son entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2016. Néanmoins, ce texte n’étant pas encore publié, il est toujours susceptible d’être modifié avant cette parution.
Le décret modifie l’article R. 5141-111 qui régit la rédaction des ordonnances vétérinaires dans le code de la santé publique et y ajoute trois articles spécifiques aux antibiotiques critiques, les futurs articles R. 5141-117-1 à R. 5141-117-3. La liste des antibiotiques critiques visés par ces dispositions sera fixée par arrêté. En pratique, seules les fluoroquinolones en « oxacine » et les céphalosporines de dernières générations (C3G/C4G) seront visées sous toutes leurs formes : injectables, orales, topiques auriculaires ou intramammaires… (voir LeFil d’hier 23 novembre).
La prescription des molécules critiques n’est possible qu’« en l’absence d’antibiotique non critique suffisamment efficace ou adapté » pour un traitement curatif ou en métaphylaxie.
Pour le démontrer, plusieurs conditions sont requises, notamment un antibiogramme.
Un examen clinique préalable est réalisé par le vétérinaire prescripteur, avec une analyse du contexte épidémiologique. En productions animales, un examen nécropsique peut remplacer l’examen clinique s’il est réalisé à la demande du vétérinaire-prescripteur. Il ne sera donc plus possible de prescrire « au comptoir » un antibiotique critique sans examen clinique, même dans les productions animales dans le cadre d’un protocole de soins.
En outre, la prescription en prévention sera interdite chez des animaux sains (sans signe clinique de maladie) exposés à des facteurs de risque.
La métaphylaxie, qui consiste à traiter un groupe d’animaux dans lequel sont mélangés des animaux malades (avec signes cliniques) et sains (sans signe clinique), ne reste possible avec un antibiotique critique « que si le vétérinaire suspecte une maladie présentant un taux élevé de mortalité ou de morbidité, pour laquelle, en l’absence de traitement précoce, une propagation rapide à l’ensemble des animaux est inévitable ».
Sur un ou plusieurs animaux vivants ou morts, le vétérinaire-prescripteur procède à un prélèvement en vue d’une analyse microbiologique avec un antibiogramme (sensible à l’antibiotique critique).
Mais, « à l’impossible, nul n’est tenu ». Ce prélèvement préalable n’est pas exigé si « la localisation, le type d’infection ou l’état général de l’animal ne permettent pas ce prélèvement ».
Le vétérinaire prescripteur conserve à la disposition des autorités les résultats de l’examen clinique et des analyses de laboratoire (antibiogrammes…) pendant au moins cinq ans. Il n’est pas exigé que le détenteur des animaux conserve le double de ces documents en cas de contrôle en élevage.
Ces examens devraient mettre en évidence que les antibiotiques critiques sont bien le seul traitement envisageable dans ce cas clinique.
En cas d’urgence (« un risque aigu d’infection »), le vétérinaire peut prescrire un antibiotique critique « avant de prendre connaissance des résultats de l’antibiogramme » s’il suspecte que les alternatives non critiques « ne seront pas suffisamment efficaces ».
« Dans un délai de quatre jours, le vétérinaire adapte le traitement en fonction des résultats de l’antibiogramme et de l’évolution du contexte clinique et épidémiologique ». Le décret inscrit ainsi dans le droit la « désescalade » telle que pratiquée en médecine humaine. En cas d’urgence, si l’état clinique des malades ne permet pas d’attendre les résultats des analyses microbiologiques, un antibiotique critique est prescrit du fait, soit de son large spectre, soit d’une forte probabilité de germes résistants dans l’affection visée. Puis, lorsque les résultats de l’analyse et de l’antibiogramme sont connus, généralement dans les 48-72 heures, il est prescrit, si possible, un antibiotique à spectre étroit et non critique. Le délai réglementaire prévu ici par le décret est de quatre jours.
Le prélèvement et l’antibiogramme ne sont pas exigés « si le vétérinaire prescripteur a connaissance de résultats d’analyses datant de moins de trois mois pour le même animal ou des animaux au même stade physiologique (dans le même élevage) et pour la même affection ».
L’Anses était opposée à cette dérogation qui, en quelque sorte, fixe une sorte de durée de validité de l’antibiogramme initialement envisagée à six mois. Selon l’Anses, cette dérogation était à la fois :
Pour l’Anses, « l’antibiogramme est indispensable et doit être rendu obligatoire » pour toute prescription d’antibiotique critique.
Deux rubriques du RCP (résumé des caractéristiques du produit) des antibiotiques critiques deviennent contraignantes : les rubriques 4.3 « contre-indications » et 4.5 « précautions d’emploi ».
En pratique, cela revient par exemple à interdire l’usage du ceftiofur chez les volailles dans la mesure où il s’agit d’une contre-indication du RCP : « ne pas utiliser chez les volailles (y compris les oeufs) en raison du risque de diffusion d’une résistance antimicrobienne à l’homme. »
Toutefois, le décret n’interdit pas la prescription des antibiotiques critiques dans le cadre de la cascade, c’est-à-dire en l’absence d’indication RCP dans l’espèce et/ou l’affection à traiter.
Trois dispositions limitent strictement la validité de la prescription à un mois avec plusieurs conséquences.
1) La durée du traitement prescrit ne dépasse par un mois au maximum, même si les durées mentionnées dans les RCP sont supérieures à un mois. C’est notamment le cas pour les pyodermites profondes des chiens où les durées de traitement « RCP » vont au-delà de 30 jours.
Pour prolonger la durée du traitement, il conviendra alors de renouveler la prescription après un nouvel examen clinique de l’animal (en se basant sur les résultats de l’antibiogramme précédent s’il date de moins de trois mois).
2) La durée de validité de l’ordonnance est aussi réduite à un mois (au lieu d’un an dans le cas général). Une ordonnance datant de plus d’un mois ne pourra donc plus servir de justificatif pour une délivrance, même si elle n’a jamais été exécutée depuis la date de sa rédaction. En outre, le détenteur des animaux ne pourra plus justifier un traitement par un antibiotique critique si son ordonnance date de plus d’un mois.
3) Le renouvellement de la délivrance à partir de la même ordonnance devient toujours interdit. Par exemple, un traitement prescrit et délivré pour une durée de 7 jours ne pourra pas être renouvelé, même si le vétérinaire mentionne sur l’ordonnance « à renouveler une fois ». Jusqu’à présent, les antibiotiques étant inscrits en liste I des substances vénéneuses, le renouvellement était déjà interdit sauf mention contraire du prescripteur.
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