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Elanco & Proplan

13 février 2019

Désinfecter le foyer d'un chat teigneux, finalement pas si difficile

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Les spores (macroconidies) de Microsporum canis, ici en microscopie optique (x 40), ne résistent pas à l'application sérieuse de procédures de nettoyage (aspiration, lavage et désinfection) de l'environnement de l'animal infecté (cliché de Roberto J. Galindo - wikimedia).
Les spores (macroconidies) de Microsporum canis, ici en microscopie optique (x 40), ne résistent pas à l'application sérieuse de procédures de nettoyage (aspiration, lavage et désinfection) de l'environnement de l'animal infecté (cliché de Roberto J. Galindo - wikimedia).
 

Pour éliminer la teigne de l'environnement domestique d'un chat teigneux, il faut que les propriétaires… suivent à la lettre les instructions de leur vétérinaire ! Telle est en substance la conclusion d'une étude rétrospective réalisée par une clinicienne de l'université du Wisonsin-Madison (USA), qui a compilé les résultats de prélèvements réalisés dans 70 foyers de chats infectés par Microsporum canis, au cours des 10 dernières années.

Spores viables

Les données scientifiques sur la teigne à M. canis spécifient bien que le rôle de l'environnement dans la transmission/l'entretien de l'infection chez les chats est faible à négligeable. « Toutefois, les propriétaires peuvent trouver [sur internet]  l'information que les spores de la teigne survivent au plus 18 mois dans l'environnement », comme par exemple sur le site de cette marque de biocides (15 mois de survie dans l'environnement) ou « plus d'un an » dans cette synthèse sur les teignes publiée par un éditeur scientifique. « Ce qui est interprété par le sens commun comme le fait qu'elles ‘vivent dans l'environnement'  ». Comme la proportion de chats porteurs de teigne en refuge est élevée, l'auteure a souhaité documenter l'efficacité des mesures recommandées d'assainissement de leur environnement, pour éviter que ces informations ne desservent les adoptions de chats.

Indications de nettoyage

Elle a donc demandé, au fil des années, aux propriétaires adoptant un chat en refuge qui développait ou avait une teigne à M. canis de se prêter à une expérience. Elle distingue deux cas de figure : les chats adoptés avant d'être découverts teigneux, et qui ont été placés dans une structure différente de leur foyer d'adoption pendant le traitement de la teigne, et les foyers qui ont gardé le chat chez eux pendant son traitement. Auquel cas, les propriétaires devaient confiner le chat dans une pièce unique pendant la durée du traitement, et de n'y laisser que les tapis lavables (pas de moquette). Le traitement de l'animal consistait en l'administration quotidienne d'itraconazole (5 mg/kg) sur trois semaines, accompagnée d'une application locale de bouillie sulfocalcique deux fois par semaine jusqu'à guérison.

Le traitement de l'environnement (la pièce de confinement) était limité aux instructions suivantes :

  • éliminer (aspirer) tous les débris (poussières, poils) visibles,
  • nettoyer toutes les surfaces avec un produit de lavage du commerce, jusqu'à ce qu'elles soient « visiblement propres », puis rincer sans excès d'eau,
  • sur les surfaces non poreuses, utiliser un désinfectant du commerce (« Javel diluée au 100e ou péroxyde d'hydrogène au 1/16e »). 

70 résultat “à domicile”

Le protocole demandait aux personnes gardant l'animal chez elles pendant son traitement de réaliser des prélèvements de son environnement dans les 1 à 2 h suivant la fin de chaque nettoyage, avec des lingettes humides. Deux prélèvements de surface étaient demandés au minimum, mais pour les personnes qui trouvaient cela insuffisant, il leur était demandé de soumettre le nombre de prélèvements qu'elles le jugeraient « rassurant » : selon les foyers, l'auteure a reçu de 4 à 22 prélèvements. Pour les personnes qui confiaient le chat teigneux à l'extérieur pour son traitement, les prélèvements étaient réalisés après son départ (et le nettoyage). Au total, sur la période 2006-2016, elle a ainsi pu collecter les éléments issus de 70 foyers ayant adopté un chat ‘teigneux'.

  • Dans 38 de ces familles, tous les prélèvements étaient négatifs après le premier nettoyage qui suivait soit le départ du chat, soit sa guérison ; sur les 32 foyers où une contamination était visible, elle était faible (mois de 3 colonies par gélose) ;
  • dans 28 autres, il a fallu un second nettoyage pour que tous les prélèvements soient négatifs ;
  • dans deux autres, il a fallu un 3e nettoyage ;
  • dans une dernière, un 4e nettoyage n'a pas suffi. L'auteure s'est renseignée auprès des propriétaires et a constaté que les consignes de nettoyage n'étaient pas appliquées correctement et qu'ils avaient « abandonné le programme ».

Suivre les instructions

Dans neuf maisons, les propriétaires avaient prélevé les bouches d'aération de la chaudière et de la ventilation ; tous ces prélèvements ont été trouvés négatifs. Dans aucune des 70 familles, il n'y a eu de mention d'une transmission de la teigne à un membre de l'entourage (humain ou animal de compagnie). Il n'y a pas eu non plus de mention de récidive chez les chats guéris. Aussi, l'auteure estime-t-elle qu'il est possible de rassurer les néo-adoptants de chats en refuge : pour la teigne, « une thérapie multimodale et un nettoyage de routine vont prendre en charge et éliminer la contamination environnementale sur les surfaces lisses comme poreuses ». Pour les textiles, une étude antérieure avait démontré que deux lavages à l'eau froide, avec un minimum de 15 minutes par cycle, sont suffisants à inactiver les spores de M. canis (voir LeFil du 3 juin 2015).