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Elanco & Proplan

25 novembre 2019

Obstruction digestive chez le lapin : la taille et la position de l'estomac confirment le diagnostic

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Les troubles du transit digestif sont une composante pathologique fréquente et grave chez le lapin de compagnie (cliché Pixabay).
Les troubles du transit digestif sont une composante pathologique fréquente et grave chez le lapin de compagnie (cliché Pixabay).
 

Les obstructions intestinales, courantes chez le lapin de compagnie, sont une cause de mortalité. Mais le diagnostic de certitude est seulement effectué post-mortem ou grâce à la chirurgie. Une étude s'est intéressée aux anomalies observées à la radiographie abdominale, afin de les exploiter pour renforcer voire confirmer le diagnostic en cas de suspicion. Et pouvoir mettre en place un traitement d'urgence adapté.

Ses auteurs, qui publient leurs observations dans le dernier JSAP (numéro de novembre, article en libre accès), constatent en effet que les vétérinaires manquent de données précises pour l'interprétation de ces radiographies : autant sur les caractéristiques d'un système digestif normal que sur les anomalies associées à une obstruction. Ils ont donc comparé une série de clichés, pris chez des lapins présentant une obstruction ou non.

Des cas confirmés par laparotomie

Les 63 cas d'obstruction intestinale inclus dans cette étude étaient avérés : confirmés lors d'une laparotomie exploratrice. La localisation de l'obstruction était ainsi renseignée, ainsi que sa cause précise pour 36 lapins.

Une radiographie de profil (droit ou gauche) de l'abdomen entier devait être disponible dans le dossier médical. Les images étaient comparées à celles de 50 lapins pour lesquels l'examen radiographique avait été effectué pour d'autres motifs qu'un trouble gastro-intestinal (des urolithiases), et qui ne présentaient aucun signe d'atteinte digestive (anorexie, constipation, dilatation de l'estomac, etc.).

L'observation du cliché comprenait :

  • La mesure de la longueur et de la largeur de l'estomac (qui seront additionnées) ;
  • Celle de la distance entre la première vertèbre lombaire (L1) et l'articulation coxo-fémorale, prise ensuite comme taille de référence ;
  • La position de l'estomac : étendu ou non au-delà de la vertèbre L2 caudalement, et ventralement en contact ou non avec la paroi de l'abdomen ;
  • Son contenu : normal (hétérogène avec une faible quantité de gaz) ou anormal (beaucoup de gaz et/ou de liquide) ;
  • La recherche d'une dilatation de l'intestin grêle par la présence de liquide ou de gaz ;
  • La quantité de gaz contenue dans le caecum et le côlon.

Trop de gaz dans l'estomac et l'intestin grêle, peu dans le côlon

Les résultats distinguent quatre principales anomalies radiographiques susceptibles d'établir le diagnostic d'obstruction.

  1. Une dilatation de l'estomac. La somme longueur + largeur de l'estomac est supérieure à la taille de référence chez tous les lapins à obstruction sauf 1 (98 %) alors qu'elle ne l'est que chez 6 des lapins "normaux" (12 %). L'estomac vient aussi en contact de la paroi abdominale chez 92 % des lapins atteints (58 cas) versus 12 %. Et il dépasse caudalement la vertèbre L2 chez 65 % (41 cas) contre aucun dans l'autre groupe.
  2. Un contenu stomacal anormalement liquide avec une grande poche de gaz (58 cas, 92 %), ou d'aspect normal (hétérogène) mais mélangé avec beaucoup de gaz (4 cas, 6 %). Seuls 1 individu et 3 autres parmi les lapins normaux présentent respectivement ces anomalies.
  3. Une dilatation de l'intestin grêle, avec la présence de liquide et/ou de gaz en quantités anormalement élevées (voir photo ci-dessous). Une telle dilatation est observée ici dans 48 % des cas d'obstruction (30/63) contre 4 % (2 cas sur 50).
  4. Une faible quantité de gaz dans le gros intestin (caecum et côlon). Du gaz est présent en grande quantité chez seulement 6 % des lapins à obstruction (n=4) mais chez 38 % des lapins normaux (n=19).

Ces éléments permettent donc de conforter le diagnostic d'occlusion. Les auteurs de l'étude précisent toutefois que la démarche consistant à mesurer les dimensions de l'estomac et les comparer à la longueur prise en référence (de L1 à l'articulation coxo-fémorale), bien que se révélant très fiable ici, doit être validée par de nouvelles études spécifiques. Idem pour l'extension caudale de l'organe.

Radiographie abdominale d'un lapin présentant une obstruction intestinale

Le cliché révèle une dilatation de l'intestin grêle, avec la présence de liquide (flèches blanches) et de gaz (flèches rouges).

Source : Debenham et al. JSAP, 2019.

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Un conglomérat de poils en cause

Sans surprise, une boule très compacte de poils est la cause la plus fréquente de l'obstruction intestinale. Elle est observée dans 81 % des cas (29/36). La présence d'un corps étranger, de diverse nature, est la seconde cause rapportée.

L'obstruction est située au niveau du pylore ou du duodenum proximal dans 21 cas, et plus distalement dans les 42 autres cas.

La dilatation intestinale oriente vers une obstruction distale

Le diagnostic radiographique de ces obstructions, d'origine mécanique, permet de mettre en place un traitement adapté, éventuellement médical. Il les distingue idéalement des cas de troubles du transit (stase digestive), fréquents aussi chez le lapin mais associés à un défaut de motilité gastro-intestinale et dont le traitement sera différent.

La dilatation de l'intestin grêle apparaît également prédictive de la localisation de l'obstruction : elle est observée dans 2 cas des obstructions proximales (10 %) mais dans la majorité des cas d'obstructions distales (28/42, soit 67 %).